Sur le vol d'Endeavour STS-47 lancé en 1992, Mae Jemison a été spécialiste de mission. En tant que première femme afro-américaine à être allée dans l'espace, la scientifique a conscience de l'importance des "role models" et figures inspirantes.
Les 25 et 26 juin, au Carrousel du Louvre, s'est tenue la 11e édition de la conférence USI. Durant deux jours, chercheurs, ingénieurs, penseurs ou entrepreneurs parmi les plus influents au monde sont intervenus sur scène pour tenter d’entrevoir, chacun à leur manière, de quoi sera fait notre futur. Cette année, Mashable avec France 24 était partenaire de l’événement, et y consacre un cycle d’entretiens avec plusieurs personnalités invitées. Retrouvez le meilleur des conférences 2018 sous le hashtag #MashableFRxUSI.
Entrer à la NASA était son rêve. Mae Jemison ne s'est pas contentée de le réaliser à titre personnel ; elle en a aussi profité au passage pour marquer l'Histoire et être la première femme afro-américaine à aller dans l'espace.
En 1992, à bord de la navette spaciale Endeavour pour la mission STS-47, l'astronaute originaire de Chicago était en charge d'étudier des cellules osseuses afin d'en savoir plus sur le mal de l'espace. Depuis, celle qui est également inscrite au National Women's Hall of Fame s'évertue à sensibiliser les femmes, et en particulier les femmes de minorités visibles, au monde scientifique.
Mae Jemison a toujours revendiqué l'influence de Martin Luther King, une personnalité qui aurait considérablement marqué sa jeunesse. En tant qu'étudiante, la jeune femme inspirée par le mouvement des droits civiques a également été représentante des étudiants noirs.
"Les 'role models' sont avant tout ces personnes de notre entourage qui nous inspirent tous les jours"
Après la NASA, la médecin et ingénieure de formation a fait une apparition dans un épisode de "Star Trek : La Nouvelle Génération", ce qui fait d'elle la première astronaute réelle à apparaître dans la série télévisée. Aujourd'hui, elle est à la tête de 100-Year Starship, une initiative de la NASA pour conduire des études sur les voyages interstellaires. "Ce dont nous avons besoin pour aller au-delà du système solaire, c'est également ce dont nous avons besoin pour survivre sur ce vaisseau qu'est la Terre : être écoresponsable", estime Mae Jemison.
Mae Jemison, vous êtes connue pour être la première femme afro-américaine à être allée dans l'espace. Il y a 25 ans, votre caméo dans "Star Trek" a achevé de faire de vous une icône. Pensez-vous que pour avancer dans la vie, nous avons tous besoin d'icônes, et donc de "role models" ?
L'expression "role models" est intéressante, mais elle est souvent mal employée. Je pense que les "role models" sont avant tout ces personnes de notre entourage qui nous inspirent tous les jours et nous aident à savoir comment nous comporter. Ce sont eux, les individus dont on apprend le plus : nos parents, nos professeurs, nos frères et sœurs, nos oncles et tantes... Ceux qui partagent notre vie et nous montrent ce qui est bon et ce qui est mauvais. Par exemple, pour être ce que je suis aujourd'hui et trouver la force d'avancer dans mon travail, je me suis inspirée de ma mère qui était enseignante et se couchait tard le soir ; de mon père qui a cumulé les boulots mais aussi de mon chat, si indépendant et si peu craintif.
Il y a un truc qui m'agace : ce sont les personnes qui estiment que l'on peut uniquement apprendre des gens qui nous ressemblent. Sauf que ce n'est pas vrai, on peut apprendre de tout le monde. Et en même temps, on devrait tous être convaincus que chacun a des talents et des compétences. Bien sûr, il est utile de savoir que des gens qui vous ressemblent ont réussi car à ce moment, tout devient plus facile.... Ces personnalités publiques ouvrent le champ des possibles. Dans la série "Star Trek", Nichelle Nichols incarne le lieutenant Uhura. Et il est vrai que c'était un personnage que je trouvais incroyable car elle était la preuve que d'autres personnes pouvaient partager les mêmes idées que moi...
Les milieux scientifiques s'ouvrent à plus de diversité, mais restent encore essentiellement masculins. Que faut-il faire pour que ces endroits soient davantage à l'image de nos sociétés plurielles ?
Une grande partie de mon travail tourne autour de la question suivante : comment inviter plus de personnes à s'intéresser aux sciences ? Comment faire pour qu'il y ait davantage de femmes à des postes académiques, dans les écoles ou les universités ? Au fond, chaque enfant peut apprendre et accomplir des choses. Mais c'est ce que nous attendons d'eux qui conditionne leur ambition.
Il faudrait réfléchir à nos façons d'amener plus de personnes vers les sciences. Quels types de laboratoires nous installons dans leurs classes ? Comment susciter la curiosité des petites filles en leur posant des questions et en les invitant à creuser pour trouver les réponses ? Ce n'est pas en passant notre temps à leur dire d'être mignonnes et de ne pas salir leurs vêtements que les choses vont changer.
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