
Depuis que le président américain Donald Trump a formulé, jeudi, la menace d'imposer dès la semaine prochaine de fortes taxes sur les importations d'acier et d'aluminium, ses partenaires commerciaux à travers le monde ont manifesté leur indignation.
De Pékin à Moscou en passant par Berlin et Londres, les réactions d'indignation sont nombreuses suite à l’annonce faite par Donald Trump d’imposer plus lourdement l’importation de certains métaux aux États-Unis : augmentation de 25 % des droits de douane sur l'acier et de 10 % sur l'aluminium.
Or le président américain assume pleinement les effets de cette annonce, en écrivant sur les réseaux sociaux : "Quand un pays (les États-Unis) perd des milliards de dollars en commerçant avec virtuellement tous les pays avec lesquels il fait des affaires, les guerres commerciales sont bonnes et faciles à gagner", a-t-il déclaré sur Twitter. "Par exemple, quand on a un déficit de 100 milliards de dollars avec un pays et qu'il fait le malin, on arrête de faire des affaires et on gagne gros. C'est facile", ajoute Donald Trump.
Aux États-Unis, quelque 4 % des importations d’acier proviennent d'Allemagne et 50 % sont issus de quatre pays : Canada, Brésil, Corée du Sud et Mexique.
Paris :
Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire a prévenu qu'une guerre commerciale "ne fera[it] que des perdants". Si de telles mesures étaient confirmées, elles auraient "un impact majeur" sur l'économie européenne et ne seraient "pas acceptables", a-t-il mis en garde. Le ministre a insisté sur le fait qu'elle appelleraient "une réponse forte, coordonée et unie de l'UE".
"Toutes les options sont sur la table", a déclaré Bruno Le Maire, évoquant "un recours devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ou des contre-mesures pour limiter les importations américaines en Europe".
Berlin :
"Le gouvernement rejette de telles taxes douanières" qui ne permettent pas de régler le problème des surcapacités mondiales dans la sidérurgie et qui vont "fortement affecter les flux commerciaux de l'acier et de l'aluminium", a déclaré à la presse le porte-parole de la chancelière Angela Merkel, Steffen Seibert.
"Le protectionnisme et les droits de douane ne sont pas la solution", a-t-il jugé, estimant qu'une "guerre commerciale" ne serait "dans l'intérêt de personne et en particulier pas dans l'intérêt de l'économie américaine".
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, a pour sa part réclamé vendredi une réaction "ferme" de l'UE. Tout comme l'association allemande de la sidérurgie Stahl, qui dénonce dans un communiqué "des mesures qui violent les règles de l'Organisation mondiale du commerce. (…) Si l'Europe n'agit pas, notre sidérurgie va payer l'addition pour le protectionnisme américain".
Bruxelles :
"Nous regrettons fortement" cette décision américaine, a réagi Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne. "Au lieu d'apporter une solution, cette décision ne peut qu'aggraver les choses", prévient-il dans un communiqué. "Nous ne resterons pas les bras croisés pendant que notre industrie est frappée par des mesures injustes".
"L'UE entamera le plus tôt possible des consultations sur le règlement des différends avec les États-Unis à Genève", le siège de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), ajoute, dans le même communiqué, la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström.
Syndicat nord-américain des sidérurgistes USW :
De son côté, le syndicat nord-américain des sidérurgistes United Steelworkers (USW), principalement actif aux États-Unis et au Canada, exige que les producteurs d'acier et d'aluminium canadiens soient exclus des mesures annoncées par Donald Trump. "Clairement, le Canada n'est pas l'un de ces mauvais acteurs impliqués dans le commerce injuste et le dumping de l'aluminium et de l'acier vers les États-Unis", précise le syndicat.
Moscou :
"De nombreuses capitales européennes ont déjà exprimé leur extrême préoccupation par rapport à cette décision. Nous partageons cette préoccupation", a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. "Nous allons attentivement analyser la situation en ce qui concerne nos relations commerciales avec Washington", a-t-il ajouté.
Londres :
"Nous avons été clairs sur le fait que nous sommes particulièrement inquiets de toute mesure qui pourrait avoir des conséquences sur l'acier du Royaume-Uni et ses industries d'aluminium", a réagi dans un communiqué l'ambassade britannique à Washington, tout en assurant être en discussion avec les Américains.
Pékin :
Pékin a enjoint les États-Unis à "refréner" leur usage de mesures protectionnistes et à "respecter les règles" du commerce international. "Si d'autres pays emboîtaient le pas [aux États-Unis], cela aurait un impact grave sur l'ordre du commerce international", s’est inquiété Hua Chunying, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères lors d'une conférence de presse régulière, rappelant que "les fondements de la reprise économique mondiale restent instables". D’autant que les États-Unis assurent d'ores et déjà "une protection excessive" à leurs producteurs locaux d'acier et d'aluminium, après avoir adopté "plus d'une centaine de contre-mesures" ciblant les importations américaines dans ces secteurs, a tancé Mme Hua. Elle n'a cependant pas évoqué de possibles représailles ou contre-mesures de la part de Pékin. Cette annonce intervient alors que Liu He, le très proche conseiller économique du président chinois, Xi Jinping, est en visite à Washington pour tenter d'aplanir les vifs différends commerciaux entre les deux puissances.
Or si la Chine produit environ la moitié de l'acier mondial, elle fournit moins de 2 % de l'acier importé par les États-Unis. De même, l'acier et l'aluminium ne constituent qu'une infime portion du total des échanges sino-américains : selon les douanes chinoises, les ventes d'aluminium représentent 0,87 % seulement du montant total des exportations du géant asiatique vers les États-Unis, et celles d'acier et de fer 0,14 % tout au plus.