Le Premier ministre Shinzo Abe, qui a déclenché des législatives anticipées, semble en passe de gagner haut la main les élections du dimanche 22 octobre. France 24 a interrogé le professeur Jeffrey Kingston sur les enjeux du scrutin.
Les Japonais se rendent aux urnes, dimanche 22 octobre, pour des législatives anticipées. Sauf surprise, ils reconduiront le Parti libéral-démocrate (PLD) du Premier ministre sortant Shinzo Abe. Mais ce dernier, avec une cote de popularité en berne, fait surtout figure de candidat par défaut. Pour analyser le paysage politique japonais, France 24 a rencontré Jeffrey Kingston, directeur des études asiatiques de l’Université du Temple de Tokyo.
France 24 - Quel est l'enjeu de cette élection ?
Jeffrey Kingston - Lors d’élections, il s’agit toujours de plaire à tout le monde. Donc [les différents candidats] veulent attirer l’attention sur la crise de sécurité nationale et dire : "Même si j’ai des défauts, ne suis-je pas plus fiable et digne de confiance que tous ces autres candidats qui n’ont pas fait leurs preuves ? Dans les mains de qui voulez-vous placer la sécurité du Japon ?" Et le PLD est le mieux placé dans ce jeu.
Y a-t-il un plébiscite pour le Premier ministre sortant, Shinzo Abe ?
Abe a été très arrogant en faisant passer la loi contre la "conspiration" [un texte controversé de lutte antiterroriste] mais il en a payé le prix en descendant à 26 % d’intentions de vote. Aujourd'hui, il s’en est vraiment remis grâce, notamment, à sa gestion des tirs de missiles nord-coréens.
Le Premier ministre sortant n’est pas particulièrement populaire. Si l'on regarde ses soutiens, on constate qu’à peu près la moitié d’entre eux sont là parce qu’il n’y a pas d’alternative. On ne peut donc pas dire qu’il y ait un plébiscite enthousiaste pour sa politique et ses qualités de dirigeant. Il est simplement avantagé par le fait qu’il n'y ait pas de rival sérieux dans la course.
Qu'en est-il de la maire de Tokyo, Yuriko Koike, l'une de ses principales rivales ?
C’est une ancienne présentatrice de télévision, donc très habile avec les médias. Elle renvoie l'image d'une personne sûre d'elle. Et elle est très intelligente, elle parle arabe et anglais et s’y connaît très bien en politique. Elle a été ministre de la Défense, de l’Environnement, donc elle a plutôt un bon CV à présenter. Elle semble raisonnable et donne l’impression d’être une "bonne amie".
Il est bien difficile de deviner qu'elle est une ultranationaliste chevronnée, qu’elle a fréquemment visité le sanctuaire de Yasukuni-jinja [un symbole du nationalisme japonais], et qu’elle est membre du Nippon Kaigi, l’un des lobbys conservateurs les plus influents du Japon.