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Hongrie : les associations s’alarment de la détention automatique des migrants

Les associations humanitaires s’inquiètent de la nouvelle loi votée mardi par le Parlement hongrois qui prévoit la mise en détention systématique de tous les demandeurs d’asile présents dans le pays.

Après la construction en février d’une deuxième barrière à sa frontière pour stopper l’arrivée des migrants, la Hongrie va encore plus loin. Le Parlement a voté mardi 7 mars, à une large majorité, une loi autorisant la mise en détention systématique de tous les demandeurs d’asile présents sur son sol. Une mesure déjà envisagée en 2013 mais à laquelle le gouvernement hongrois avait renoncé sous la pression de l’Union européenne (UE) et de la Cour européenne des droits de l’Homme.

Cette privation de liberté s’appliquera aussi bien aux nouveaux venus qu’aux migrants déjà présents dans le pays, au nombre de 586 en février. Ces derniers seraient ainsi détenus dans des conteneurs entourés de barbelés, les privant de toute liberté.

Une loi contraire au droit européen

Cette loi scandalise les associations et les instances internationales à l’image du Haut-commissariat pour les réfugiés (HCR) qui s’est dit "profondément préoccupé", par l’adoption de cette mesure. "Elle viole les obligations de la Hongrie vis-à-vis des lois internationales et européennes", écrit l’agence onusienne dans un communiqué publié mardi. Même son de cloche chez Amnesty International qui dénonce "une violation flagrante du droit international" et rappelle que la détention ne peut être appliquée qu’en cas de dernier recours.

Par cette loi, la Hongrie touche aux "fondements et à l’essence même de l’Union européenne", explique à France 24 Jean-François Dubost, responsable du programme Protection des populations pour Amnesty, qui regrette dans le même temps l’absence de réaction des États membres.

Les différentes associations demandent d’ailleurs à l’unisson une réponse rapide de l’UE, à l’instar de Human Rights Watch (HRW). "La Commission européenne ne devrait pas rester en place pendant que la Hongrie se moque du droit de demander l’asile", a ainsi déclaré le 27 février Benjamin Ward, directeur adjoint de la division Europe et Asie centrale de HRW. Dans un communiqué publié mercredi 8 mars, Amnesty International exhorte l’UE "à réagir et à montrer à la Hongrie que ce type de mesures illégales et profondément inhumaines a des conséquences".

Impact psychologique et physique

Pour Jean-François Dubost, ces mesures portées par le président conservateur Viktor Orbán, qui avait lui-même comparé les migrants à du poison, "diabolisent et déshumanisent" un peu plus les demandeurs d’asile. D’autant plus qu’elles concernent aussi bien les hommes que les femmes et surtout les enfants de plus de 14 ans. Le HCR estime que "les enfants ne devraient jamais être détenus quelles que soient les circonstances car la détention n’est jamais dans l’intérêt supérieur de l’enfant".

New law in Hungary will have terrible physical & psychological impact on people who have already greatly suffered https://t.co/K9SsNr1uAX pic.twitter.com/UdZUCRsqEI

— UN Refugee Agency (@Refugees) 7 mars 2017

De plus, l’absence de contact avec l’extérieur, le fait d’être enfermé, la promiscuité et l’incertitude sur l’avenir peut avoir un impact psychologique et physique chez ces personnes vulnérables qui ont déjà subi des atrocités dans leur pays ou sur la route de l’exil. "Les migrants sont ainsi transformés en délinquants", souffle Jean-François Dubost qui se demande : "Où va-t-on s’arrêter ?". Le responsable du programme "Protection des populations" pour Amnesty rappelle que cette loi participe à la politique menée depuis plusieurs mois par Orbán. Celui-ci n’hésite d’ailleurs pas à faire poursuivre les migrants par des chiens de garde dans le but d’empêcher ces derniers de passer la frontière.