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Élections législatives au Maroc : un face à face serré entre le PJD et le PAM

La campagne électorale marocaine pour les élections législatives a été officiellement lancée. Ce vote s'annonce comme un duel entre les islamistes du PJD au pouvoir depuis 2011 et le Parti authenticité et modernité d'inspiration libérale.

Près de 10 000 personnes se sont réunies dimanche 25 septembre à Rabat pour le premier meeting du parti de la Justice et du développement (PJD), marquant ainsi le véritable début de la campagne pour les élections législatives marocaines du 7 octobre.

Au pouvoir depuis 2011, le chef du PJD et Premier ministre Abdelilah Benkirane a harangué ses supporters : "Si Dieu le veut, nous gagnerons". "Le peuple veut un deuxième mandat !", lui ont répondu ses partisans, dans une salle bondée couverte d’immenses affiches portant l’emblème du parti, la lampe à huile.

Le meeting du PJD à Rabat

Aux dernières élections, le PJD avait remporté un succès historique, dans le sillage des Printemps arabes, des contestations de rue au Maroc et d’une vaste réforme constitutionnelle voulue par le roi Mohammed VI. "En 2011, plutôt que d'égarer notre pays dans des aventures, […] nous avons choisi la réforme dans la stabilité", a expliqué le chef du gouvernement lors du meeting. "Le bateau allait couler, l’économie était au plus mal", a-t-il insisté. "Aujourd’hui, vous pouvez lever la tête et être fiers, vous avez sauvé le pays de la catastrophe".

Le PJD reste la seule formation islamiste encore au pouvoir dans un pays de la région. Après cinq années aux affaires, à la tête d’une coalition faite de libéraux, de communistes, et de conservateurs, il garde une réelle audience dans le pays. Le parti islamiste a cependant été éclaboussé ces dernières semaines par plusieurs scandales de mœurs. La dernière en date, relayée par la presse du pays, concerne une relation extraconjugale entre le chef du groupe parlementaire du PJD et une jeune élue du parti islamiste.

"Leur idéologie nous fait peur"

Le PJD doit aussi faire face à la vive concurrence du Parti authenticité et modernité (PAM), une formation d’inspiration libérale fondée en 2008 par un proche du roi, Fouad Ali El Himma. Même si les sondages sont officiellement interdits depuis des semaines, le scrutin s’annonce d’ores et déjà comme un face à face serré entre ces deux formations politiques.

Dans cette campagne, le PAM se pose en adversaire de la "marée conservatrice", tout en dénonçant les dérives religieuses du parti d’Abdelilah Benkirane. "Notre problème avec le PJD vient de son projet et de son idéologie", a ainsi critiqué auprès de l’AFP, son secrétaire général Ilyas El Omari. "Récemment, le Premier ministre a dit se référer, en sa qualité de chef du parti, à la doctrine d’Ibn Taymiyya [un théologien sunnite du XIVe souvent instrumentalisé par certains groupes jihadistes]". Selon Ilyas El Omari, les membres du PJD montrent aussi trop de proximité avec le théoricien controversé Sayyid Qutb, militant radical inspirateur des Frères musulmans en Égypte.

"Leur idéologie nous fait peur. Ce qui se passe dans notre société fait peur, […] avec de violentes réactions contre la modernisation, des mœurs, des agressions", a-t-il ajouté. Le PAM a ainsi fait de la défense de la femme l’un de ses grands axes de campagne, affichant son ambition de faire entrer 30 femmes dans un Parlement qui en manque cruellement.

Ilyas El Omari en campagne électorale

تجاوب كبير مع الجولة التواصلية لإلياس العماري وأسماء الشعبي بسوق حد الدرى https://t.co/17adEVG93S

— Ilyas Elomari (@ElomariIlyas) 25 septembre 2016

Vers une forte abstention?

De leur côté, les adversaires du chef du PAM, Benkirane en tête, l’accusent d’être un "opportuniste" en service commandé pour le palais. "La majorité des partis marocains actuels ont été créés par des proches du roi. Y compris le PJD", répond Ilyas El Omari à ses critiques, démentant toute proximité particulière avec l’entourage du souverain.

Au total, une trentaine de partis vont prendre part à ce scrutin au cours duquel près de 16 millions d’électeurs sont appelés à voter pour élire leurs 394 députés. Les salafistes vont notamment faire leur grand retour dans le jeu électoral, dont ils étaient exclus depuis plusieurs années et qui se présentent sous plusieurs étiquettes. La candidature pour le PJD d’un cheikh emblématique Hamed Kabbaj a cependant été invalidée pour "extrémisme".

L’autre grande incertitude repose surtout sur la participation. En 2011, le taux d’abstention avait été très élevé avec 55 %, même s’il était en recul par rapport à 2008 (63 %).

Avec AFP