
Alors que le président Nicolas Sarkozy affirme que la burqa n'est "pas la bienvenue" en France, pays laïc, le débat est également relancé en Belgique, où Mahinur Özdemir devient la première élue d'une assemblée belge à porter le voile.
AFP - La prestation de serment mardi d'une députée bruxelloise portant le foulard islamique et une proposition du ministère de la Justice d'autoriser ses fonctionnaires à porter le voile ont relancé en Belgique la polémique sur les signes religieux et la neutralité de l'Etat.
Mahinur Özdemir, 26 ans, diplômée en sciences politiques, a prêté serment en milieu d'après-midi en tant que députée du Parlement régional de Bruxelles, dont elle est la cadette depuis les élections régionales du 7 juin.
Le sourire aux lèvres, portant un ensemble beige et un foulard à carreaux turquoises, blancs et dorés, elle a été applaudie par le public, nombreux, où se trouvaient des membres de sa famille.
Fille de petits commerçants turcs, Mahinur Özdemir est membre du Centre démocrate humaniste (CDH), l'ancien parti social-chrétien francophone.
"Le voile n'est en rien un frein à mon émancipation, ce qui est vraiment important pour moi, c'est les projets que je veux mener", a-t-elle déclaré, assaillie par les journalistes belges et étrangers.
Quelques opposants au foulard avaient distribué des tracs à l'entrée du parlement, mais sans troubler la séance.
"Nous sommes l'image de la société, un parlement doit être l'image de la société", a assuré celle qui entend "ne pas être la représentante d'une communauté mais de tous les Bruxellois".
Mme Özdemir fait partie d'une vague d'élus d'origine étrangère, principalement marocaine et turque, entrée depuis 10 ans au parlement régional de Bruxelles, ville dont le tiers de la population est musulmane, selon une étude réalisée en 2008 par l'Université catholique de Louvain.
En devenant la première élue d'une assemblée belge à porter le voile, elle a relancé un débat qui, en Belgique comme en France, divise l'opinion.
Pendant que Nicolas Sarkozy affirmait lundi que la burqa n'était "pas la bienvenue" en France, le député belge Denis Ducarme, du parti libéral MR proche de l'UMP, proposait que les "signes religieux ou philosophiques distinctifs" soient interdits dans les parlements du royaume.
Mais cette proposition a été critiquée jusque dans son propre camp, notamment par le président du Sénat, Armand De Decker. Il a estimé que "rien ne s'oppose" à ce qu'un "mandataire politique décide de porter un signe distinctif".
La Belgique est en effet "un Etat neutre" et non laïc, explique le directeur du Centre pour l'Egalité des chances, Edouard Delruelle. "On y intègre les différentes convictions en présence. L'école publique est un bel exemple: on y dispense à la fois des cours de religion catholique, protestante, islamique, israélite et des cours de morale laïque", dit-il.
L'autorisation ou l'interdiction du port du voile par les élèves est donc laissée à l'appréciation des directeurs d'école. Qui sont de plus en plus nombreux à le bannir, comme l'ont décidé deux lycées anversois mardi.
Dans l'administration, il est généralement admis que les fonctionnaires relevant de la force publique --policiers ou magistrats notamment-- soient interdits de voile. Mais la question n'est pas tranchée pour les autres fonctionnaires.
La "cellule diversité" du ministère de la Justice a alimenté le débat mardi en proposant que tous les fonctionnaires de ce département, y compris ceux qui côtoient le public, soient autorisés à porter des signes religieux.
La "neutralité des agents" n'est pas liée à leur apparence, a estimé cette cellule, dont l'avis n'est que consultatif. Une opinion contestée par l'organisme représentatif du mouvement laïc belge, qui "milite depuis toujours pour une séparation claire des Eglises et de l'Etat".