L'un des géants de la poésie française contemporaine, Yves Bonnefoy s'est éteint vendredi à l'âge de 93 ans. Plusieurs fois pressenti pour le Prix Nobel de littérature, il était également essayiste et traducteur réputé de Shakespeare.
Yves Bonnefoy, l'un des grands noms de la poésie contemporaine, également critique d'art et traducteur, est mort vendredi 1er juillet à l'âge de 93 ans, annoncé samedi le Collège de France où il était professeur honoraire.
Auteur de plus de 100 livres, traduit en une trentaine de langues, il a été lauréat en France du Grand prix de poésie 1981 de l'Académie française, du prix Goncourt 1987 de la poésie et a remporté le prix mondial Cino del Duca 1995.
Le président François Hollande a salué dans un communiqué l’œuvre de Yves Bonnefoy, plusieurs fois cité pour le Prix Nobel de littérature : "Immense poète, critique d’art, traducteur, professeur au Collège de France, Yves Bonnefoy était un artiste de la parole, un magicien des mots, un rêveur du réel".
"La poésie était pour lui une aventure de l'esprit, et la plus noble", a également souligné Isabelle Gallimard, directrice du Mercure de France, chez qui il avait publié "L'écharpe rouge" en 2016. "Désormais ses livres nous font escorte à voix haute, à voix basse, modulant un phrasé, un rythme de sereine lucidité, entre tous singulier", a-t-elle ajouté.
"Un regard unique"
Nombre de personnalités ou d'admirateurs dans le monde entier ont célébré sa mémoire, souvent en citant ses vers sur les réseaux sociaux."Le chant délicat de la poésie d'Yves Bonnefoy nous accompagnera toujours car le blé qui va lever ici sera le pain de nouveaux échanges", a écrit sur Twitter l'ancienne ministre de la Culture Aurélie Filippetti.
"Yves Bonnefoy, c'est à la fois l'un des très grands poètes de la fin du surréalisme français, qui a constamment travaillé sur le langage, qui a minéralisé progressivement sa poésie. Et en même temps, ça a été un regard unique sur la littérature et la peinture occidentales", a déclaré le ministre de l'Économie Emmanuel Macron, dont c'est "l'un des poètes préférés".
Né le 24 juin 1923 à Tours (Indre-et-Loire), Yves Bonnefoy a étudié les mathématiques puis l'histoire de la philosophie et des sciences, avant d'adhérer un temps au surréalisme dont il s'écarte rapidement. À 30 ans, sa réputation est lancée avec la publication de "Du mouvement et de l'immobilité de Douve", un recueil à contre-courant de l'époque, marqué par le dépouillement et une quête intérieure qui range déjà son auteur parmi les plus grands poètes français.
Il signe ensuite notamment "Hier régnant désert" (1958), "Pierre écrite" (1965), "Dans le leurre du ciel" (1975), "Ce qui fut sans lumière" (1987), "La vie errante" (1993), "L'encore aveugle" (1997) ou "Les planches courbes" (2001). Très actif en dépit de son âge, on lui devait encore cette année "L'écharpe rouge" ou "La poésie et la gnose".
Sa poésie, grave et généreuse, attentive aux sonorités, avait remporté l'adhésion de la critique et de fidèles lecteurs, séduits par son goût du "sensible" et son refus de "l'abstrait". Yves Bonnefoy a aussi analysé dans ses ouvrages la poésie des autres ("Notre besoin de Rimbaud"), l'art italien ("Rêve fait à Mantoue", "Rome 1630") ou la peinture ("Giacometti", "Goya, les peintures noires"). C'était enfin le traducteur de l'essentiel du théâtre de Shakespeare mais aussi de Yeats, Pétrarque ou Georges Seferis.
Avec AFP