
Reconnu coupable de crimes contre l'humanité, crimes de guerre, crimes de torture et viols, l'ex-président tchadien Hissène Habré a été condamné, lundi à Dakar, à la prison à perpétuité par la Chambre africaine extraordinaire.
C’est la fin d’un procès qui doit servir d'exemple en Afrique. Un quart de siècle après sa chute, l'ex-président tchadien Hissène Habré a été condamné, lundi 30 mai à Dakar, à la prison à vie pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre, crimes de torture et viols. Une commission d'enquête tchadienne estime le bilan de la répression sous Hissène Habré à quelque 40 000 morts.
Arrêté le 30 juin 2013, Hissène Habré était jugé depuis le 20 juillet 2015 par les Chambres africaines extraordinaires (CAE), mises en place en vertu d'un accord entre le Sénégal et l'Union africaine (UA), qu'il récusait et devant lesquelles il refusait de s'exprimer ou de se défendre.
"Inspirer les survivants" d'autres crimes
Ce procès est le premier au monde dans lequel un ancien chef d'État est traduit devant une juridiction d'un autre pays pour violations présumées des droits de l'Homme, se félicite Reed Brody, cheville ouvrière de cette procédure au sein de Human Rights Watch (HRW). Il vise également à répondre aux griefs croissants contre la Cour pénale internationale (CPI), siégeant à La Haye, accusée de ne poursuivre que des dirigeants africains, en montrant que le continent peut les juger lui-même.

"Ce procès est un précédent extraordinaire, qui montre que des tribunaux africains peuvent juger des crimes commis en Afrique, a déclaré Reed Brody à l'AFP. Nous espérons que d'autres survivants, d'autres militants, s'inspireront de ce que les victimes de Habré sont parvenues à accomplir."
Avec ce procès, "c'est l'Afrique qui a montré sa capacité à juger l'un des siens", s'est félicité sur France 24 Patrick Baudoin, président d'honneur de la Fédération des ligues des droits de l'Homme.
Hissène Habré purgera sa peine au Sénégal ou dans un autre pays de l'UA mais il peut également faire appel. Avec sa condamnation en première instance s'ouvre une autre phase durant laquelle seront examinées d'éventuelles demandes de réparation au civil.
Un collectif d'organisations de défense des droits de l'Homme internationales et africaines avait salué, dans un communiqué publié dimanche, "la tenue d'un procès exemplaire devant déboucher sur un verdict historique", mais appelle les juges à définir rapidement "des procédures permettant l'examen des demandes de réparations des victimes". "Le fonds au profit des victimes prévu dans le statut [des Chambres africaines extraordinaires, NDLR] n'est pas encore opérationnel", soulignent ces organisations.
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Avec AFP