L'Institut du monde arabe, à Paris, accueille l'exposition "CoeXisT" du Français Combo Culture Kidnapper, artiste de rue qui célèbre le vivre ensemble à travers ses œuvres. Fort de ses origines multiples, "il s'autorise à tout brocarder".
L’artiste de rue Combo pose ses valises jusqu’au 6 mars à l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris. Ce street artiste français, qui a fait de la rue son moyen d’expression, revient avec "CoeXisT", œuvre créée après les attentats qui ont décimé la rédaction de Charlie Hebdo, pour prôner un message de paix et de tolérance entre les religions monothéistes.
Combo Culture Kidnapper est un homme "multiple", gentiment transgresseur. Il sillonne le monde en quête de "provocation" et de… "sourires". Armé de bombes et de rouleaux, l’artiste, barbu, parfois vêtu d’une djellaba, s’autoproclame à la fois Mohamed, Michel et Moshe. Ces trois personnages "CoeXisT" dans la tolérance : le C pour le croissant musulman, le X pour l’étoile de David et le T pour la croix chrétienne, sous le pseudonyme de Combo Culture Kidnapper, histoire de brasser large.
Un Français en accord avec sa culture
L’artiste, fort de son talent, reste "raisonnablement" déterminé à heurter les tabous. "CoeXist", créée suite à l’attentat contre l'équipe de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015, lui avait valu une agression à Paris, un mois après la tuerie. Mais pour diffuser son message de tolérance, Combo a choisi les bombes de peinture et des rouleaux de papier imprimé. Son but ? Susciter des réactions. "Je suis agressé en créant 'CoeXisT', que j’interprète avec un personnage, commente l’artiste. Et ce personnage est illustré par une photo de moi avec une barbe et une djellaba : le problème pour mes agresseurs était de voir ce musulman-là peindre 'CoeXisT'." Mais Combo ne se définit pas en tant que musulman. Il est, clame-t-il, une personne. Un Français, en accord avec lui-même, avec sa culture et son identité.
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Né il y a 28 ans, à Amiens, d’un père libanais chrétien et d’une mère marocaine musulmane, le jeune adolescent passe vite du graffiti improvisé dans le sud de la France (2003) à la célèbre école des Beaux-arts de la Ville Arson à Nice (2005). Son expérience de publicitaire dans des boîtes pourtant réputées comme Canal+ ou Peugeot (2010) ne résisteront pas à sa passion.
De Hong Kong à Tchernobyl, de Beyrouth à Tel-Aviv, de Tunis à Genève, ses réalisations picturales vont interpeller, dénoncer, irriter. "Je traite de tout, sans tabou ni préjugé, revendique Combo. Fort de mon identité multiple, et de mes convictions, je m’autorise à brocarder jusqu’aux les religions". Et tant pis si, vu sa "tête" et sa "barbe", on le prend pour un "musulman, même pour un musulman pur et dur".
"Shaloum Alikoum !"
Des "phrases désagréables", il en entend lors de ses expositions. Mais, ne s’écartant guère de l’objectif, il continue à "faire bouger les lignes". Assumant désormais pleinement son arabité, il n’en crée pas moins deux autres personnages venus rompre la solitude de Mohamed. Et c’est d’un "Shaloum Alikoum" fraternel que Moshe et Michel vont le saluer… sur les murs. "CoeXisT" est né.
Physiquement blessé, psychologiquement touché, l’homme sortira de l’agression à Paris renforcé même s'il pense que "ce que dit la France en ce moment est raciste". Il a, depuis, "ouvert la porte à tout ce qui était" en lui "en tant que Français" pour le "laisser sortir" et se "sentir encore plus à l’aise dans (son) identité multiple".
De ses voyages, notamment sur les terres respectives de ses parents, il s’est rendu compte "que ni le Liban ni le Maroc ne sont" ses pays. "Ma patrie est la France, conclut Combo ; c’est fou comme on se sent plus Français là-bas qu’ici".