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De l’est de la Grèce à l’extrême nord de la France, des milliers de migrants, fuyant la Syrie, l'Irak ou encore l'Afghanistan, empruntent la route des Balkans. Karim Hakiki, reporter de France 24, livre ses impressions dans son carnet de route.

Ils arrivent par milliers. Après avoir bravé les dangers d’une traversée de la Méditerranée, ils débarquent sur les côtes européennes, notamment grecques, avec le ferme espoir d'une vie meilleure, loin des violences. Quels sont leurs désirs et leurs regrets ? Comment vivent-ils, seuls ou en famille, l’exil et la précarité ? Qui sont ceux que l’Europe nomme communément "les migrants" ? De Thessalonique, en Grèce, jusqu’à Calais, dernière étape avant le Royaume-Uni, une équipe de France 24 suit la route empruntée par des dizaines de milliers de personnes, jetées sur les routes par la guerre et les persécutions. Au-delà de cette actualité, France 24 vous propose quotidiennement de découvrir le regard que porte notre reporter Karim Hakiki sur ce périple.

Mercredi 9 septembre, Stuttgart (Allemagne)

"Hier, on a été toute la journée sur la route. De Munich, on a rejoint Stuttgart. Et on a quitté Stuttgart ce matin. Dans la voiture, on discutait, on montait nos sujets et d’un coup, j’ai levé la tête et j’ai vu les panneaux en français. On s’est dit 'Oh mais on est en France ? Ça y est, on est de retour au bercail…' Franchement, ça nous a fait tout drôle, après tout ce qu’on a vu, après les 3 000 km sur la route…"

"À Stuttgart, on a tourné dans une PME, dans un abattoir chez un boucher qui a du mal à recruter des Allemands. Du coup il a recruté un jeune migrant d’origine érythréenne en contrat d’apprentissage. Ce boucher nous a dit qu’il attendait avec impatience l’arrivée de jeunes syriens. 'Il faut les former, nous a-t-il dit, nous avons des besoins énormes de main d’œuvre. Je les aide, mais ce sont surtout eux qui m’aident à développer mon entreprise'. C’était un bon témoignage, un truc un peu positif, optimiste. Ce boucher a évacué rapidement les questions d’intégration en disant : 'Il n’y aura pas de problème d’intégration, c’est par le travail qu’ils vont s’intégrer'. Et je pense qu’il a raison".

"Et puis à notre hôtel, Adel [Gastel, envoyé spécial pour la chaîne arabophone de France 24], en discutant avec le réceptionniste, se rend compte qu’il s’agit d’un étudiant syrien, arrivé à Stuttgart il y a un an, légalement, par avion, avec un visa étudiant. Il vit et paie ses études en travaillant dans l’hôtel. On est allés chez lui, on a essayé de comprendre son parcours, on lui a demandé ce qu’il pensait du périple long et dangereux que font les migrants pour venir en Europe. Il nous a répondu : 'Ça vaut le coup ! Ceux que j’ai au téléphone ou par Skype, je leur dit de venir, je leur donne des astuces pour qu’ils me rejoignent.' Il a même guidé trois groupes de personnes venant de sa ville en Syrie, Hama, pour leur dire comment faire pour arriver en Allemagne. Lui, au bout d’un an, il est devenu un vrai petit allemand. Il parle bien, il a plein d’amis. Sa vie est là ! On a tourné une petite séquence avec ce jeune homme, qui s’appelle aussi Adel. On va l’intégrer dans un futur reportage pour le magazine Reporter".

"D’ailleurs, on jongle un peu tous les jours entre les sujets 'news' et les sujets magazine. En rentrant, on doit compiler ce que nous avons vu pendant notre périple en un sujet magazine de 13 minutes. Hier, sur la longue route entre Munich et Stuttgart, on a beaucoup réfléchi avec Adel sur la manière d’écrire notre 'mag'. Ce n’est pas évident, on n’a pas de fil rouge avec un personnage qu’on aurait suivi tout au long du chemin. Finalement on s’est décidé pour faire un carnet de route."

>> Retrouvez les carnets de route "Les chemins de l'exil"