Le président américain Barack Obama a promulgué mardi soir une loi limitant les moyens de surveillance de la NSA, l'agence américaine de sécurité. Une victoire, selon les démocrates, un "pas en arrière", selon le chef de file des républicains.
C’est une réforme qu’Obama voulait et qu’Obama a eue. À l’issue de plusieurs jours de tractations, le Congrès américain a adopté mardi 2 mai une réforme phare qui réduit considérablement les leviers d’action de la NSA, l'agence nationale de sécurité américaine, dont l'ampleur de la surveillance avait été révélée par Edward Snowden. Cette nouvelle loi vise à mieux protéger les libertés civiles et la vie privée, tout en assurant "la sécurité nationale", s'est félicité le président Barack Obama, en promulguant cette loi quelques heures après son vote par le Congrès.
Concrètement, cette législation - comprise dans le USA Freedom Act - a pour objectif de limiter le programme de la NSA en matière de collecte des métadonnées des appels téléphoniques (destinataire, heure d’appel, géolocalisation…). "C'est un moment historique", a commenté le sénateur démocrate Patrick Leahy, à l'issue du vote remporté par 67 voix contre 32. Cette réforme est "le premier remaniement majeur depuis des décennies de la législation sur la surveillance par le gouvernement".
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La collecte des métadonnées téléphoniques par la NSA était la plus critiquée des mesures de surveillance mises en place dans le cadre du Patriot Act, voté juste après les attentats du 11-Septembre. L'ampleur des pouvoirs de surveillance octroyés à la NSA avait été révélée par son ancien consultant, Edward Snowden, en juin 2013.
"Pas en arrière"
La réforme prévoit de transférer le stockage des métadonnées aux compagnies de télécommunications, afin d'apaiser les craintes sur la surveillance des Américains par leur gouvernement. Désormais, les autorités devront passer par la case justice pour accéder à ces donnés. Plus précisément, obtenir une autorisation d'un juge émanant d'un tribunal antiterroriste secret, dit "FISA", en ayant l’obligation de révéler l’identité de la personne suspectée.
Le texte prévoit également de redonner à la NSA le pouvoir de traquer les suspects considérés comme des "loups solitaires" et de les mettre sur écoute. Deux dispositions qui étaient arrivées à échéance dimanche soir. L'agence de surveillance avait dû interrompre totalement la collecte des métadonnées depuis lundi 00 h 01, en raison de l'expiration de la section 215 du Patriot Act, qui en fondait la légalité.
Hors du territoire américain, le Freedom Act ne changera strictement rien à la surveillance pratiquée par la NSA à l’étranger.
L'adoption de ce texte est le fruit d'une alliance entre les démocrates du Sénat et certains des républicains les plus conservateurs de la Chambre des représentants. Cela représente une victoire pour Barack Obama et un revers pour Mitch McConnell, chef de file des républicains au Sénat. Ce dernier a d'ailleurs qualifié la réforme de "pas en arrière".
Le sénateur Rand Paul, candidat à l'investiture républicaine pour l'élection présidentielle de 2016 et adversaire résolu de toute contrainte fédérale sur la liberté individuelle, avait joué les trublions à plusieurs reprises dans l'examen législatif du Freedom Act". Il a notamment fait obstruction au processus par un discours de 10 heures, le 20 mai dernier.
"Victoire pour les utilisateurs d’internet partout"
La réforme était soutenue par les grandes entreprises Internet et informatiques américaines, dont l'image avait souffert de leur coopération supposée avec la NSA, et par une partie des ONG qui défendent la vie privée et combattent la surveillance électronique.
Le géant Yahoo! a salué dans un communiqué l'adoption d'un texte qui représente "une victoire pour les utilisateurs d'Internet partout" et "qui aide à protéger nos utilisateurs en réformant de manière très importante les programmes de surveillance et les pratiques du gouvernement américain".
De son côté, le directeur juridique adjoint de la puissante organisation américaine des droits civiques ACLU a qualifié ce vote d'"étape importante"."C'est la plus importante loi de réforme en matière de surveillance depuis 1978, et son adoption constitue une indication que les Américains ne sont plus désireux de donner carte blanche aux agences de renseignement", a commenté Jameel Jaffer.
Avec AFP et Reuters