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La mission risquée de David Cameron en Europe

David Cameron part cette semaine à l’offensive des membres de l’Union européenne pour les convaincre d’obtenir des "réformes" d’envergure à Bruxelles. "Une gageure" pour nombre d’observateurs.

C’est une semaine délicate qui s’ouvre pour David Cameron. Le Premier ministre britannique entame dès jeudi une tournée européenne pour vendre son projet de référendum sur l'appartenance du Royaume-Uni à une Union européenne préalablement réformée.

Le candidat qu’il était encore il y a quelques semaines s’était en effet engagé dans un discours prononcé le 23 janvier 2013 à organiser avant la fin 2017 un référendum sur le maintien ou la sortie de son pays de l’UE. Une promesse faite à l’époque dans l’unique but de ralentir la progression du Ukip, parti favorable à la sortie du Royaume-Uni.

Fidèle à son engagement électoral, le Premier ministre espère donc rencontrer les 27 chefs d'État ou de gouvernement de l'UE avant le conseil européen de la fin juin pour tenter de trouver des alliés dans les réformes économiques, sociales et structurelles qu’il entend mener à Bruxelles.

Course politique

Dès mercredi soir, il partira au Danemark, où il participera jeudi à un petit-déjeuner de travail avec la cheffe du gouvernement danois Helle Thorning-Schmidt. Dans la même journée, David Cameron est attendu aux Pays-Bas, où il rencontrera le Premier ministre, Mark Rutte, et en France, où il dînera jeudi 28 mai à l'Élysée avec le président Hollande.
Son sprint diplomatique continuera vendredi à Varsovie avec la Première ministre polonaise, Ewa Kopacz, et s’achèvera avec la chancelière allemande Angela Merkel à Berlin.

Autant de responsables politiques que David Cameron devra convaincre. Pour y parvenir, il a tout intérêt "à adopter des stratégies différentes en fonction de ses interlocuteurs et de la situation particulière dans laquelle se trouve l’État membre", explique à France 24 Alain Dauvergne, conseiller à l’Institut Jacques Delors. "Car je ne suis pas sûr qu’il dispose de soutiens globaux mais d’oreilles attentives dans des domaines bien précis."

"Négociations périlleuses"

Le locataire du 10, Downing Street devra ainsi convaincre pour augmenter la compétitivité des entreprises, plus de souveraineté des États, restreindre la libre circulation et les droits sociaux des migrants, développer les relations entre les pays membres et non-membres de l’Eurogroupe, ou encore abandonner l'idée d’une "union toujours plus étroite entre les peuples européens".

Le chef du gouvernement britannique peut "espérer avoir une écoute attentive des Pays-Bas, et du Danemark en ce qui concerne les questions d’immigration", explique Yves Bertoncini, directeur de l’Institut Jacques Delors. David Cameron veut notamment que les migrants en provenance d'autres pays de l'UE justifient de quatre années de présence sur le sol britannique avant d'être éligibles à un ensemble d'avantages sociaux. Au contraire, "l’Allemagne et la Suède, qui ont besoin de l’immigration pour faire tourner leur économie ne manqueront pas de manifester leur désaccord", poursuit le directeur.

Il peut toutefois compter sur Berlin et certains pays de l’Europe centrale comme la Pologne ou la Tchécoslovaquie pour évoquer le dossier de la compétitivité en Europe. Si la France partage avec ces derniers le désir de faire progresser la croissance, elle n’est cependant pas d’accord avec certains points du partenariat transatlantique de commerce et d'investissement.

"Une gageure"

Si David Cameron peut "espérer trouver quelques alliés sur certains des points qu’il soulève, poursuit le spécialiste européen, la négociation sera difficile, voire périlleuse. Car, de son propre aveu, les changements qu’il réclame nécessiteraient une modification des traités existants. Or il faut, pour cela, l’accord unanime des 28 États membres. Une gageure", soutient Alain Dauvergne.

En attendant le référendum, David Cameron a tout intérêt à convaincre ses homologues pour revenir victorieux auprès de l’opinion publique britannique. Car un échec de sa part pourrait favoriser une sortie de l’UE lors du référendum, s’accordent à dire les spécialistes. "Le Royaume-Uni se trouverait alors dans une situation inextricable et subirait des pressions de toutes parts. Des Européens mais aussi des Américains qui n’ont aucun intérêt à perdre ce puissant allié au cœur de l’Europe."