
Selon les premiers résultats des élections présidentielles, les candidats nationalistes des trois principales communautés de Bosnie-Herzégovine - croate, musulmane et serbe - sont bien placés pour emporter la présidence collégiale du pays.
Près de vingt ans après un conflit sanglant qui a fait près de 100 000 morts, les nationalismes continuent à diviser la Bosnie-Herzégovine. Dimanche, près de 3,3 millions d'électeurs se sont rendus aux urnes afin d'élire, pour quatre ans, les trois membres de la présidence collégiale du pays. Ces derniers représentent les trois "peuples constitutifs" et fixent la politique étrangère du pays..
Si les résultats définitifs seront annoncés dans les dix jours, les premiers chiffres officiels, publiés lundi 13 octobre, laissent apparaître que les principales formations nationalistes musulmane, serbe et croate ont imposé leur candidat.
Ainsi, Bakir Izetbegovic, candidat du parti nationaliste musulman (SDA), a été élu au sein de la présidence bosnienne tournante, de même que le leader croate Dragan Covic, soutenu par les nationalistes du parti Union démocratique croate de Bosnie et Herzégovine (HDZ BIH). Chez les Serbes, même si le résultat est encore très serré, le siège reviendra soit à Mladen Ivanic, candidat d'une coalition emmenée par les nationalistes du SDS, soit à la candidate du parti au pouvoir (SNSD, nationalistes), Zeljka Cvijanovic.
"Retour aux années 1990"
Dimanche, les Bosniens étaient aussi appelés à renouveler le Parlement central du pays et les assemblées des deux entités territoriales, qui composent la Bosnie depuis la fin de la guerre - la Republika Srpska (RS, serbe) et la Fédération croato-musulmane. Selon les chiffres quasi définitifs, les formations nationalistes sont là aussi bien placées pour prendre le contrôle des institutions.
"À défaut de choix compétents et d'une offre politique sérieuse, les citoyens ont voté pour une sorte de retour aux années 1990", a estimé à l'AFP l'analyste politique Enver Kazaz, en faisant référence aux formations nationalistes au pouvoir durant la guerre. "Ces nationalistes, ces faux modérés, n'iront pas jusqu'à se faire la guerre mais ils n'hésiteront pas à se lancer dans des disputes politiciennes", qui vont miner tout espoir de redressement du pays et de rapprochement avec l'Union européenne, a-t-il poursuivi.
La Bosnie confrontée à une grave crise économique
À l'issue de ces scrutins, qui se sont déroulés dans un contexte de crise économique et de fronde sociale, des analystes soulignent que les gagnants, quels qu’ils soient, auront du mal à sortir le pays du marasme économique. "On ne peut pas s'attendre à des changements importants car ce sont plus ou moins les mêmes partis qui sont bien placés pour former les nouvelles institutions", a affirmé l'analyste politique, Vehid Sehic.
La Bosnie, l’un des pays les plus pauvres d’Europe, est confrontée à une grave crise économique. Sur 3,8 millions d'habitants, 18 % vivent dans une pauvreté extrême et environ 44 % de la population active est au chômage. En février dernier, le pays a été secoué par une vague de manifestations contre la pauvreté et la corruption, sans précédent depuis la fin de la guerre (1992-95).
Outre les problèmes économiques, la Bosnie s'est retrouvée à la traîne dans les Balkans en termes de rapprochement avec l'Union européenne à cause de permanentes querelles politiciennes interethniques. Malgré les pressions de la communauté internationale, aucune réforme importante requise par Bruxelles n'a été récemment faite.
Avec AFP