
La population de la capitale centrafricaine ne cachait pas, vendredi, sa satisfaction de voir l'armée tchadienne se retirer de la force africaine en Centrafrique (Misca), accusée de soutenir les rebelles de la Séléka, à majorité musulmane. Reportage.
"Ils sont un obstacle pour la paix ! Nous voulons leur départ du pays !", s’emporte un Centrafricain dans les rues de Bangui. Une grande partie de la population de la capitale centrafricaine a laissé éclater sa joie, vendredi 4 avril, au passage des convois tchadiens quittant la ville.
N’Djamena a fait savoir, la veille, que le Tchad renonçait à sa participation à la Misca, la mission de maintien de la paix de l'Union africaine en Centrafrique, dénonçant "une campagne gratuite et malveillante" contre ses troupes.
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, est arrivé, samedi, à Bangui pour une visite de quelques heures destinée à afficher la détermination des Nations unies à déployer une force de maintien de la paix en Centrafrique.
Il devait s'entretenir avec la présidente centrafricaine de transition, Catherine Samba Panza, des moyens pour mettre fin au cycle de violences intercommunautaires et interreligieuses.
Ban Ki-moon doit également prononcer un discours devant le Conseil national de transition pour renouveler ses appels à une mobilisation internationale. Il plaide pour le déploiement avant fin 2014 d'une opération de l'ONU en Centrafrique, forte de 12 000 hommes.
Cette opération devrait prendre le relais des Français de Sangaris, de la Misca et de la force européenne attendue prochainement à Bangui.
Avec AFP
Le Tchad et l'ONU à couteaux tirés
Les soldats tchadiens sont régulièrement accusés de prendre le parti des rebelles de la Séléka, composés essentiellement de musulmans. La population chrétienne et les anti-Balaka se sont toujours montrés très hostiles à leur égard. L’ONU les a en outre accusés d’avoir gratuitement abattu la semaine dernière une trentaine de personnes.
Samedi 5 avril, le gouvernement tchadien a répliqué, accusant l'ONU de "propos diffamatoires et tendancieux". Dans un communiqué, il "exprime sa surprise et son indignation face à une prétendue enquête publiée par la Commission des Nations unies pour les droits de l'Homme", indique le communiqué.
Le rapport de l'ONU, "rédigé sans aucun doute dans un salon huppé, s'inscrit en droite ligne de la campagne malveillante contre notre pays [...] et il est aux antipodes des faits réels", poursuit-t-il.
"Il est demandé à la population de rester chez elle"
C’est donc dans une ambiance tendue et sous les regards de quelques chrétiens massés sur le bord de la route que les convois de N’Djamena ont quitté la capitale. "Les rues sont désertes, il a été demandé à la population de rester chez elle. Les convois tchadiens sont escortés par des contingents de la Misca et ceux de l’opération Sangaris [force française en Centrafrique, NDLR]. L'itinéraire n'est pas sans danger", raconte Tatiana Mossot, correspondante de FRANCE 24 en RCA.
"Après le départ de ces convois, il ne devrait rester aucun soldat tchadien dans la ville de Bangui", a déclaré de son côté le général Martin Tumenta Chomu, commandant de la Misca. S'il en reste un, ce sera considéré comme de l'indiscipline", a-t-il prévenu.
Même la presse de Bangui semblait se réjouir de ce départ. "Adieu les oppresseurs et les envahisseurs de la RCA à la solde d'Idriss Déby Itno [le président tchadien]", titrait ainsi, vendredi, le quotidien "Centrafric matin".