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Le chargeur universel pour mobiles, réalité ou utopie ?

L’Union européenne s'est engagée, jeudi, à imposer un chargeur universel pour téléphones portables d’ici à trois ans. Il y a quelques années, une initiative similaire avait échoué, faute d'accord entre les industriels.

Il aura fallu quatre ans d’efforts. Le Parlement européen a donné, jeudi 13 mars, son feu vert à la Commission européenne pour imposer un chargeur universel pour téléphones portables, tablettes et même GPS au sein de l’Union européenne (UE). “Fini les tiroirs remplis de 1 001 câbles et chargeurs différents !”, s’est réjouit Marc Tarabella, eurodéputé socialiste belge.

Le projet législatif, largement approuvé par 550 voix pour, 12 contre, 8 abstentions, ne devrait, toutefois, pas se concrétiser avant 2017. “Les États membres auront deux ans pour transposer ces règles en droit national et les fabricants auront un délai supplémentaire d’un an pour s’y conformer”, précise le Parlement.

Moins cher et écolo

Très attendu par les utilisateurs - et par le Centre européen des consommateurs qui soutient farouchement le projet -, l’objectif premier de ce chargeur est de “simplifier la vie et faire baisser les prix en interdisant les rentes que constituait la vente de chargeurs pour les fabricants”, indique la délégation socialiste française au Parlement européen.

Celle-ci souligne également les vertus écologiques de cet outil universel en soulignant qu’il va permettre de “réduire le nombre de chargeurs en circulation, ce qui est bénéfique pour l’environnement !” Selon le site de la Commission européenne, “plus d’un milliard de chargeurs inutilisés dormiraient dans les armoires et tiroirs des Européens". À cela s’ajoutent les 50 000 tonnes de chargeurs obsolètes qui sont jetés chaque année.

D’après le site d'information high-tech Zdnet, en 2010, on dénombrait encore une trentaine de chargeurs différents en circulation. Depuis, le modèle micro-USB - qui pourrait être celui du futur chargeur universel, s’est quelque peu démocratisé. Il est, par exemple, possible aujourd’hui de recharger son mobile LG avec un chargeur Blackberry. Mais la partie semble loin d’être gagnée, certains industriels faisant toujours de la résistance.

Apple, le rebelle

C’est le cas du poids lourd Apple qui n’a pas hésité à introduire un nouveau chargeur baptisé le Lightning lors du lancement de son iPhone 5 à l’automne 2012. En face, plusieurs équipementiers comme Nokia, Sony Ericsson et Samsung semblent davantage enclins à rentrer dans les rangs. Ces trois acteurs majeurs ont signé, en 2010, un accord avec la Commission européenne pour le développement d’un chargeur unique. Le Bureau des consommateurs européens (Beuc) avait alors regretté qu'il ne s'agisse que d'un “accord de l'industrie sur une base volontaire.”

Cette foi-ci, pour s’assurer que le projet aboutisse, la Commission a annoncé qu’elle lançait une étude pour définir plus précisément en quoi consistera le chargeur et dans quelles conditions exactes il sera imposé. Un “nouvel accord volontaire pour l'industrie et des mesures juridiquement contraignantes” semblent inévitables, selon la commissaire européenne en charge du dossier, Neelie Kroes.

Samsung à bord

Et celle-ci peut déjà se gausser d’un soutien de choix : “Samsung s'engage à rendre ses technologies accessibles à tous et salue les efforts du secteur électronique pour harmoniser les chargeurs de smartphones”, a annoncé la firme sud-coréenne dans un communiqué. Samsung se dit également prêt “à travailler aux côtés d'autres fabricants (…) pour trouver des solutions universelles afin de répondre aux demandes des consommateurs.”

Une position qui compte d’autant plus que Samsung et ses 42,9 % de parts de marché demeure le leader incontesté parmi les 32,6 millions de smartphones vendus en 2013 en Europe de l’Ouest. Avec 17,5 %, le numéro 2 Apple a de quoi peser fortement dans la balance mais la concurrence - en particulier Sony et LG - progresse à une vitesse vertigineuse. S’ils rejoignent Samsung, Apple apparaîtrait alors de plus en plus isolé (ce qui n’a pas coutume d’effrayer la firme à la pomme), et le projet de chargeur unique de plus en plus concret.

Mais là encore, de nombreuses questions techniques se posent. Comment l'UE compte-t-elle imposer une norme à des fabriquants non-européens ? Comment va-t-elle les convaincre ? Les chaînes de production devront-elles désormais s'adapter en produisant des chargeur UE et d'autres chargeurs monde ? Quid des millions d'appareils actuels dont les chargeurs deviendraient de fait obsolètes ? Autant d'interrogations qui font sérieusement douter de la viabilité du projet.