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L’Assemblée nationale malgache doit dégager, mardi, une majorité qui pourrait aboutir à la désignation d'un Premier ministre. Longtemps pressenti, l’ex-homme fort de la Transition, Andry Rajoelina, pourrait voir le poste lui échapper.

Certains disent qu’il rêve d’un scénario à la Poutine-Medvedev mais les exigences de la communauté internationale et l’ambiguïté des textes officiels pourraient contrarier ses plans. Bien que les résultats définitifs des législatives malgaches, proclamés le 13 février, aient placé en tête le camp de l'ex-ancien président de la Transition, Andry Rajoelina, rien n’indique que ce dernier pourra briguer le poste de Premier ministre. Et espérer ainsi revenir au pouvoir par des moyens détournés, après avoir été empêché de se présenter à l'élection présidentielle.

Avec 49 sièges - sur les 151 que compte l’Assemblée nationale -, le parti d'Andry Rajoelina (Mapar) devient la première force politique de la Grande-Île, loin devant la formation de l’ancien président Marc Ravalomanana (19 sièges). Une majorité sur laquelle le Mapar s’appuie pour réclamer le droit de nommer le prochain chef du gouvernement. "On ne revendique pas ! C'est notre droit", a même tranché sur RFI Jean de Dieu Maharante, le président du Mapar.

Quelle majorité ?

Reste que plusieurs obstacles se dressent sur la route de Rajoelina. Constitutionnellement puisque rien dans la loi fondamentale ne stipule clairement s'il lui faut la majorité relative ou absolue au Parlement pour choisir le Premier ministre. "Le président de la République nomme le Premier ministre, présenté par le parti ou le groupe de partis majoritaire à l’Assemblée nationale", indique l'article 54 de la Constitution.

Aussi, les députés proches de Ravamolamanana aiment-ils rappeler que "majoritaire" implique d’"avoir plus de la moitié du nombre des députés à l’Assemblée nationale malgache", ce qui signifierait que le Mapar ait 78 députés. En ne disposant que d’un tiers des sièges, la mouvance de Rajoelina doit donc attendre que l’Assemblée nationale se réunisse mardi 18 février en session spéciale pour définir une majorité.

Les indépendants faiseurs de roi

Depuis plusieurs jours, les deux camps tentent ainsi de convaincre les indépendants de les rejoindre, afin de pouvoir constituer une coalition majoritaire. Arrivés en nombre dans l’Assemblée, les députés affiliés à aucun grand parti peuvent effectivement faire basculer le rapport de force au sein de l’hémicycle. Une perspective que semble craindre le Mapar qui, par la voix de son président, a demandé que le flou juridique entourant la désignation du Premier ministre soit d’abord dissipé. "Il y a une demande en interprétation de l'article 54" et "il serait mieux d'attendre l'avis de la Haute cour constitutionnelle", a-t-il déclaré.

Mais dans les couloirs de l’Assemblée la course au ralliement a déjà commencé. La bataille est si âpre que certains membres de la société civile ont mis en garde les responsables politiques contre toute dérive qui pourrait jeter le discrédit sur la nouvelle législature. "Si cela fait partie du jeu parlementaire normal, les négociations ne doivent pas relever du marchandage, du chantage et encore moins de la corruption", écrit l’Observatoire de la vie publique (Sefafi) sur son site Internet.

Même si à l’issue des tractations le Mapar obtient une confortable majorité, il est toutefois incertain qu’Andry Rajoelina se voit confier la charge de former un gouvernement. Car, handicap de taille, Rajoelina serait aujourd'hui en délicatesse avec le chef de l’État, Hery Rajaonarimampianina, qu'il avait pourtant ouvertement soutenu lors de la campagne pour la présidentielle. Un parrainage qui, à l'époque, avait valu à "Hery", comme l'appellent ses compatriotes, d'être considéré comme le candidat prête-nom de Rajoelina.

Des personnalités plus "présentables"

Élu pour remettre l’économie malgache sur les rails, le nouveau président s’est toutefois donné pour défi de ressouder une unité nationale éprouvée par cinq années de crise. Depuis son accession au pouvoir, Rajaonarimampianina prend chaque jour un peu plus ses distances avec celui qui reste associé, aux yeux de la communauté internationale et de nombreux Malgaches, à cette période d’instabilité politique que fut la Transition.

D’après RFI, des personnalités du Mapar plus "présentables" seraient donc en bonne position pour occuper le poste de Premier ministre. Parmi les noms qui circulent figurent celui de Haja Resampa, ancien secrétaire général de la présidence, et celui du patron du Mapar, Jean de Dieu Maharante.

Si le parti de Rajoelina devait être mis en minorité à l’Assemblée, la primature pourrait revenir à un proche de l’actuel chef de l’État, tels Rolland Jules Etienne et Roger Kolo, deux médecins dont les dossiers de candidature à la présidentielle avaient été invalidés. Disqualifiés, ils étaient restés tous deux aux côtés de Hery Rajaonarimampianina lors de la campagne.