
Bloquées du temps de Nicolas Sarkozy, les négociations en vue d’une adhésion de la Turquie à l’Union européenne pourraient relancer les pourparlers. Mais François Hollande l’assure : ce sont les Français qui auront le dernier mot.
Enterré par Nicolas Sarkozy, le débat refait surface. Au premier jour d’une visite d’État de 48 heures, lundi 27 janvier, François Hollande a remis à l’ordre du jour la question de l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Une manière d’apaiser les relations houleuses entre Paris et Ankara depuis que son prédécesseur avait mis son veto sur la candidature turque.
Immédiatement après avoir évoqué le sujet, lors d’une conférence de presse avec son homologue turc Abdullah Gül, le président s'est efforcé de désamorcer les craintes que pourraient susciter une adhésion de la Turquie à l'UE. "Inutile d'ajouter quelle que peur que ce soit, le peuple français sera de toute façon consulté", a déclaré François Hollande, qui évoque donc un référendum mais précise qu’”aucune date [de reprise des négociations] n’était prévue”. Un peu plus tôt, le président turc avait dit attendre de la France "qu'elle n'apporte pas de blocage politique" au processus. "Nous ne sommes pas pressés", a-t-il également souligné, souhaitant que la crise politique que traverse le pays ne pèse pas sur les discussions.
Plus de 80 % des Français contre l’adhésion
Mais dans l’Hexagone, le sujet est particulièrement sensible. Plus de 80 % de Français refusent de voir la Turquie intégrer l’Europe, selon un récent sondage de l’Ifop pour Valeurs Actuelles. En 2003, ils étaient 54 %. Un rejet croissant qui est couplé à une crispation diplomatique de plus en plus gênante.
En 2007, Nicolas Sarkozy, fraîchement élu président de la République, refuse de se joindre aux discussions entamées entre Ankara et Bruxelles depuis 2005. Déjà perturbé par un certain nombre de réformes au point mort en Turquie, le processus de négociations se trouve finalement interrompu à l’automne 2007 par la Commission européenne. En cause : le refus d'Ankara de reconnaître l'État chypriote.
Le voyage en Arménie de Nicolas Sarkozy en octobre 2011 va ensuite finir de dégrader les relations franco-turques. À cette occasion, l’ancien président annonce qu’il soutient un projet de loi - depuis avorté - faisant condamner les négationnistes du génocide arménien de 1915 reconnu officiellement par la France depuis 2001. Ankara fulmine.
“Travail de mémoire” sur le génocide arménien
François Hollande, de son côté, avait confirmé, peu après son élection en 2012, son engagement à pénaliser la négation du génocide arménien. À Ankara, ce lundi, il s’est contenté d’exhorter la Turquie à faire son "travail de mémoire".
Avec cette visite - la première d’un chef d’État français depuis celle de François Mitterrand il y a 22 ans -, son discours édulcoré et sa volonté de remettre l’adhésion de la Turquie à la table des négociations, François Hollande devrait réchauffer quelque peu les relations diplomatiques et économiques entre les deux pays. Mais à quelques semaines des élections européennes, le président va devoir aussi s’attacher à ne pas froisser une opinion publique massivement contre l’entrée de la Turquie au sein de l’UE.
Avec AFP et Reuters