Le premier tour des élections législatives maliennes s’est tenu dimanche. Si aucun incident majeur n’a été relevé lors du scrutin, le taux de participation est nettement inférieur à celui de la présidentielle. Analyse.
Contrairement à la présidentielle de cet été, qui avait enregistré un taux de participation proche de 50 % , le premier tour des élections législatives, dimanche 24 novembre au Mali, n’a pas attiré les foules. "Les bureaux de vote étaient déserts", rapporte Julien Sauvaget, envoyé spécial de FRANCE 24 à Bamako. De fait, le taux de participation devrait s’établir sous les 30 %, selon le Pôle d'observation citoyenne électorale (POCE), rassemblement d'ONG qui avait déployé 3 700 observateurs dans tout le pays pour ce premier tour.
"Avant la dernière présidentielle [qui a vu l’arrivée au pouvoir d’Ibrahim Boubacar Keïta, surnommé IBK], ce taux de participation aurait été habituel", relativise André Bourgeot, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de la bande sahélo-saharienne. Contacté par FRANCE 24, il attribue ce chiffre à la "mauvaise" représentation du pouvoir que se font les citoyens du Mali. "Pour les Maliens, c’est le président de la République qui représente l’État, pas les députés." Pour que ce taux soit plus élevé, "il aurait fallu faire d’une pierre deux coups en couplant la présidentielle et les législatives", estime-t-il.
IBK homme à poigne ?
À peine trois mois après son arrivée au pouvoir, IBK commence à cristalliser les mécontentements. Le sud du pays attend de lui qu’il remette de l’ordre au nord, mais de nombreux incidents, assassinats et attentats y ont eu lieu ces dernières semaines. Le nord espère lui davantage d’autonomie, mais ne voit rien venir. "IBK s’est fait élire sur une réputation d’homme à poigne, mais les décisions qu’il a prises ne vont pas encore dans ce sens", résume André Bourgeot. En outre, IBK n’a pas résolu le cas d'Amadou Sanogo. L’officier putschiste qui avait renversé l’ancien président Amadou Toumani Touré, a été bombardé général et se rit toujours de la justice. Convoqué par un juge d’instruction, il ne s’est toujours pas rendu au tribunal.
itDimanche 24 novembre, le président IBK a essayé de reprendre la main en rappelant ses objectifs pour le Mali : "la paix et le développement". Mais "il est tributaire de la politique française", précise André Bourgeot. Par ailleurs, le nouveau président doit faire face aux accusations de népotisme depuis que les Maliens ont appris que son fils Karim Keïta se présentait aux législatives dans la circonscription de la commune II de Bamako. Âgé de 34 ans, ce dernier a grandi loin du Mali, notamment en France où il est né, et ne possède que peu d’expérience en politique..
Malgré tout, le parti RPM d’IBK fait figure de favori pour le scrutin législatif, dont les premiers résultats sont attendus dans le courant de la semaine. En cas d’absence de majorité, un second tour est prévu le 15 décembre prochain. Soumaïla Cissé, arrivé second à la présidentielle, a déjà confié qu’il se verrait bien chef de l’opposition parlementaire. Dans la situation politico-militaire qui prévaut actuellement, la formation d’une opposition démocratique est également l'un des enjeux que doit relever le Mali.