
La Commission électorale centrale a annoncé mardi, soit 24 heures avant le scrutin, la victoire du président sortant Ilham Aliev. En Azerbaïdjan, le pouvoir est tenu d’une main de fer par la famille Aliev depuis la fin des années 60.
Ilham Aliev largement réélu pour un troisième mandat président d'Azerbaïdjan. Cette information pourrait paraître anecdotique tant l’issue du scrutin était connue de tous. Seulement voilà, elle a été donnée mardi 8 octobre, soit 24 heures avant la tenue du scrutin, par la très officielle Commission électorale centrale, rapporte le Washington Post.
Les utilisateurs de l’application smartphone créée pour suivre en direct les opérations de vote ont reçu un message les alertant que le chef de l’Etat sortant avait raflé 72,76% des suffrages face à son principal challenger Jamil Hasanli, qui lui, ne comptabilisait que 7,4 % des voix.
Une bévue rapidement corrigée par la Commission qui a affirmé qu’il s’agissait des résultats de 2008 envoyés pour tester le service. Une explication peu crédible dans la mesure où en 2008 Ilham Aliev a été élu avec 87% des suffrages et que les candidats en lice face au président sortant en 2008 n’étaient pas les mêmes.
La mission d'observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a confirmé des fraudes lors du scrutin présidentiel de mercredi.
"D'importants problèmes ont été observés à toutes les étapes de l'élection, ils ont souligné le caractère grave des manquements qui doivent être réglés pour permettre à l'Azerbaïdjan de respecter entièrement ses engagements devant l'OSCE sur de véritables élections démocratiques", a ainsi souligné l'organisation dans un communiqué.
Reste que cette annonce n’était que banalement prémonitoire. Jeudi 10 octobre après le dépouillement de 98% des bulletins, la Commission électorale centrale a annoncé qu'Ilham Aliev avait recueilli environ 84,6% des voix.
"Un triomphe de la démocratie"
"L'élection présidentielle en Azerbaïdjan a été un triomphe de la démocratie", a déclaré à la télévision Ilham Aliev, qui rempile pour un troisième mandat après avoir succédé à son père en 2003. "Le fait que le vote était libre et transparent est un pas important vers la démocratie", a-t-il affirmé.
Jamil Hasanli ne totalise que 5,5% des voix, selon ces résultats. Il a d'ores et déjà dénoncé des fraudes "massives" et a averti qu'il ne reconnaîtrait pas les résultats du scrutin.
Au total, dix candidats étaient en lice pour la présidence de cette ex-République soviétique du Caucase du Sud riche en hydrocarbures. Nombre d’entre eux ont dénoncé des irrégularités mercredi 9 octobre, notamment le vote dans plusieurs bureaux des mêmes électeurs.
Âgé de 51 ans, Ilham Aliev a succédé à son père Heydar Aliev, ancien du KGB, en 2003. En 2008, il a été réélu pour un deuxième quinquennat, avant d'obtenir par référendum en 2009 la levée de la limitation à deux mandats présidentiels consécutifs.
Une fortune estimée à plusieurs dizaines de millions d'euros
Selon ses partisans, lui et son père ont su faire de cette ancienne République soviétique du Caucase un producteur florissant d'hydrocarbures, courtisé par l'Europe.
Quant à la fortune de la famille Aliev, il s'agit d'une question difficile à aborder ouvertement en Azerbaïdjan. Des enquêtes ont trouvé la trace de sociétés offshore, et selon une journaliste d'investigation, Khadija Ismayilova, les Aliev contrôlent un pan important du secteur de la banque, de la construction et des télécoms.
En 2010, le Washington Post avait trouvé trace de biens immobiliers d'une valeur de 75 millions de dollars à Dubaï au nom du fils du président, Heydar, et de ses sœurs Arzu et Leyla.
Mais les critiques soulignent que père et fils ont pour cela écrasé toute opposition et usé de leur pouvoir pour amasser une fortune qui se chiffrerait en milliards de dollars. "Son objectif semble être un environnement politique dans lequel la dynastie Aliev ne connaît aucune concurrence", observait ainsi un câble diplomatique occidental révélé par le site WikiLeaks.
Avec dépêches