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Corruption en Espagne : l'opposition exige la démission de Mariano Rajoy

La publication de messages échangés entre le Premier ministre et l’ex-trésorier du Parti populaire est un nouveau coup dur pour la droite, embourbée dans un vaste scandale de corruption. L'opposition demande la démission de Mariano Rajoy.

Nouveau coup dur pour la droite espagnole. Le quotidien "El Mundo" a publié dimanche 14 juillet plusieurs échanges de messages téléphoniques entre l’actuel chef du gouvernement Mariano Rajoy et Luis Barcenas, l’ancien trésorier du Parti populaire (PP). Ces SMS établissent, selon le journal, une "connivence" entre les deux hommes, au cœur d’une vaste affaire de corruption qui empoisonne la droite espagnole depuis le début de l’année.

L’affaire éclate le 16 janvier, lorsque la justice espagnole révèle l’existence d’un compte en Suisse au nom de l’ancien trésorier du PP. Deux jours plus tard, "El Mundo" sort une enquête fracassante, révélant le versement de "compléments de salaire" aux principaux cadres du Parti populaire entre 1990 et 2009. Selon le journal, l’argent viendrait d’une caisse noire du parti, alimentée par des entreprises privées pour remercier les élus PP de leurs faveurs politiques, comme l’attribution de contrats publics. Quelques semaines plus tard, d’autres révélations, notamment publiées par "El Pais", éclaboussent nommément Mariano Rajoy, qui nie avoir "perçu ou distribué de l’argent noir".
Luis Barcenas entendu dans la journée par un juge
Aujourd’hui, avec la publication des SMS par "El Mundo", l’étau se resserre autour du chef du gouvernement espagnol. Selon le quotidien, "Mariano Rajoy a maintenu un contact direct et permanent avec Luis Barcenas", et "lui a demandé qu’il nie l’existence de la comptabilité occulte et les compléments de salaire". Dans l’un des SMS attribués à Mariano Rajoy, et envoyé le jour des premières révélations d’"El Mundo", le 18 janvier, il est écrit : "Luis, je comprends, sois fort. Je t’appelle demain. Je t’embrasse". Dans un autre, envoyé le 14 mars, Luis Barcenas, visiblement en colère, assure à Mariano Rajoy qu’il se sent "libéré de tout engagement envers [lui] et envers le parti", et menace "de révéler la véritable comptabilité du parti" à la presse.
"La publication de supposées conversations par SMS entre Luis Barcenas et Mariano Rajoy prouve qu’ils auraient entretenu des relations au moins jusqu’au mois de mars, contrairement à ce qu’a affirmé Mariano Rajoy jusqu’à présent", précise Adeline Percept, la correspondante de FRANCE 24 à Madrid.
La publication de ces messages arrive quelques jours seulement après un article choc, publié par le même quotidien, dans lequel l’ancien trésorier du PP, en détention préventive depuis fin juin, raconte les pressions qu’il subit. "Luis Barcenas […] explique que des émissaires ont été envoyés en prison par le PP et par Mariano Rajoy pour lui dire: ‘Si tu parles, ta femme ira en prison. Si tu te tais, le ministre de la Justice sera démis et ton dossier sera classé’", raconte Adeline Percept. "Luis Barcenas est un homme seul, acculé, il ne veut pas tomber tout seul", poursuit la journaliste. L’ancien trésorier a fourni à "El Mundo" une nouvelle série de documents manuscrits prouvant la perception de compléments de salaire illégaux par plusieurs dirigeants du PP, dont l’actuel Premier ministre. Il doit être entendu dans la journée par un juge au sujet de ces derniers documents.
"Voleurs !"
Dimanche soir, des dizaines de manifestants se sont rassemblés devant le siège du PP, criant "Voleurs !" et "Ici, c’est la caverne d’Ali Baba !". Alfredo Perez Rubalcaba, numéro un du Parti socialiste, a réclamé la démission de Mariano Rajoy : "Face à la situation politique insoutenable que traverse l’Espagne, le Parti socialiste se voit obligé d’exiger la démission immédiate du chef du gouvernement", a-t-il déclaré. C’est la deuxième fois depuis le début de l’affaire que les socialistes exigent que Mariano Rajoy quitte son poste. "Le comportement de monsieur Rajoy face à cette affaire peut se résumer très simplement : aucune explication, des mensonges et, d’après ce que nous apprenons aujourd’hui [dimanche, NDLR], de la connivence, une grave connivence", a ajouté le chef de l’opposition.
Des propos jugés "lamentables" par Carlos Floriano, le vice-président du PP. Selon lui,  "les SMS publiés sont la preuve matérielle d'une tentative de chantage privé dont Barcenas n'a rien obtenu".