
Selon plusieurs sondages sortis des urnes, le parti conservateur de l'ancien Premier ministre Boïko Borissov obtient près d'un tiers des suffrages des élections législatives. Les socialistes recueilleraient entre 25 % et 27 % des voix.
Le parti conservateur bulgare GERB de l'ancien Premier ministre Boïko Borissov, renversé cet hiver sous la pression de la rue, a remporté dimanche soir l'élection législative anticipée mais sans majorité, ce qui risque de replonger le pays dans la crise.
Il recueillerait entre 30,4 et 34% des suffrages, son principal rival, le Parti socialiste (PSB, ex-communiste) entre 25,3 et 27,1%, selon des sondages de cinq instituts réalisés à la sortie des bureaux de vote.
C'est la première fois en Bulgarie qu'un parti est réélu depuis la fin du régime communiste il y a 23 ans.
Mais, ce score, s'il est confirmé, ne donne pas de majorité parlementaire aux conservateurs et la formation d'un gouvernement de coalition s'annonce périlleuse tant les affrontements de la campagne électorale ont été rudes. La commission électorale ne fournira des résultats partiels que lundi en fin de matinée.
Les deux autres partis ayant franchi la barre des 4% nécessaire pour entrer au Parlement, qui comporte 240 sièges, sont le Mouvement pour les droits et libertés (MDL, minorité musulmane turque), crédité de 10% à 11,5% des voix, et le parti nationaliste et xénophobe Ataka (entre 7,3 et 8,6%).
Ataka a soutenu un temps Boïko Borissov après la formation d'un gouvernement minoritaire en 2009, mais son dirigeant, Volen Siderov, a clairement exclu cette option dimanche, accusant le GERB "d'avoir menti".
"Il y a un très grand danger de blocage du Parlement", a réagi Ognian Mintchev, directeur de l'institut d'études régionales et internationales. "Nous ne saurons que demain avec certitude" qui "sera le 5e parti ou s'il y en aura un. Les principaux partis d'opposition -- PSB et MDL -- pourraient aussi avoir ensemble soit moins de 120 sièges ou plus et cela change tout", a souligné Andrey Raytchev, de l'institut Gallup.
Les socialistes et le MDL avaient formé une coalition entre 2005 et 2009, sous le mandat de Sergueï Stanichev, le dirigeant du PSB.
Après les manifestations massives de cet hiver, les Bulgares ont voté dimanche sans se faire trop d'illusions : la campagne électorale, loin de répondre à leurs attentes, a viré au règlement de comptes entre socialistes et conservateurs autour d'un scandale d'écoutes téléphoniques illégales.
Comme prévu, ils ont quelque peu boudé les urnes : environ 50% des 6,9 millions d'électeurs ont voté, selon les sondages, contre environ 60,2% il y a quatre ans.
Si aucun gouvernement n'est formé après le scrutin, le cabinet intérimaire dirigé par le diplomate Marin Raykov restera aux affaires jusqu'à l'éventuelle organisation de nouvelles élections à l'automne.
Une telle impasse ne ferait qu'aggraver la situation économique du pays, le plus pauvre de l'Union européenne, où la croissance n'a atteint que 0,8% l'an passé et où près d'une personne sur cinq est sans emploi, selon des chiffres officieux.
Certains politologues n'excluent pas une reprise de la crise sociale de l'hiver dernier. Des dizaines de milliers de Bulgares étaient alors descendus dans les rues des grandes villes pour protester contre l'explosion de leur facture d'électricité. Sept personnes, dont six sont décédées, s'étaient immolées par le feu.
Le mouvement spontané s'était transformé, sous l'influence de multiples groupes de la société civile, en une vaste mobilisation contre la misère chronique, le chômage et la corruption qui ronge la classe politique et les institutions de ce pays le plus pauvre de l'Union européenne.
"Ce vote est sur la voie de reproduire le précédent parlement de l'oligarchie et de la mafia que nous avons chassé. Cette fois nous aurons des barricades, pas des protestations!", a prévenu l'un des organisateurs des manifestations, Angel Slavchev.
Une centaine de manifestants, dont certains ont jeté des pierres et des bouteilles, se sont réunis dimanche soir devant le Palais de la culture à Sofia, où se trouve le centre de presse et où les principaux responsables politiques étaient attendus. Ils ont scandé "mafia!" et "ordures!" ou encore "tous dehors". Quelques accrochages ont eu lieu avec la police.
La révélation samedi d'une vaste fraude présumée avait attisé les tensions. Le Parquet de Sofia avait annoncé la saisie de 350.000 bulletins de vote suspects dans une imprimerie.
Les socialistes ont accusé le GERB de vouloir "totalement falsifier les élections". Les conservateurs ont démenti, criant au complot politique.
Des affaires d'achats de vote, pratique répandue en Bulgarie et qui séduit les plus démunis, notamment au sein de la minorité rom, ont aussi terni ces élections.
Disant craindre des fraudes, des partis opposés au GERB ont commandé un comptage des voix parallèle par l'institut autrichien SORA, qui donnera ses estimations tard dans la soirée.
AFP