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L’Allemagne profite de l'émigration des Européens du Sud

Selon un rapport allemand, des milliers d’émigrés italiens, grecs et espagnols affluent vers Berlin pour échapper aux politiques d’austérité de leurs pays. Une aubaine pour l’Allemagne en recherche de main d’œuvre pour compenser son vieillissement.

C’est la plus forte poussée migratoire depuis 1995. Selon un rapport allemand de l’Office des statistiques Destatis publié le 7 mai, l’Allemagne a connu un nouveau bond de l'immigration en 2012, avec l’arrivée de 1 081 millions d’immigrants sur son territoire, soit une hausse de 13% par rapport à 2011.

Si les États d’Europe centrale (Pologne, Roumanie, Hongrie) constituent toujours le plus fort contingent des nouveaux immigrés, le nombre d’arrivants en provenance des pays du sud de l'Europe est en revanche particulièrement spectaculaire depuis 2011. Fuyant la récession et l’austérité, des nouveaux émigrés venus de Grèce, d’Italie et d’Espagne ont franchi en masse la frontière allemande ces deux dernières années pour y tenter leur chance. Selon le rapport Destatis, les entrées en provenance d'Espagne ont ainsi augmenté de 44,7%, celles de Grèce ont fait un bond de 43,4% et celles de l’Italie de 39,8%.

"L'augmentation significative de l'émigration espagnole est frappante. Jamais, depuis 1973 […] on a trouvé de chiffres similaires", note même le quotidien espagnol "El Pais" dans son édition du 7 mai.

L’Allemagne appauvrit ses voisins européens

Il est vrai qu’à première vue, l’Allemagne ressemble à un eldorado européen pour les pays du sud. Avec un taux de chômage à 6,9%, le pays, raisonnablement épargné par la crise, est attractif pour tous les précaires accablés par le chômage (qui caracole autour de 25% en Espagne et en Grèce) et les politiques d’austérité imposées à leurs gouvernements.

L’Allemagne ne cache pas sa satisfaction de voir affluer ces nouveaux travailleurs, au contraire : en raison de sa faible démographie et pour compenser le vieillissement de sa population, ses besoins en main-d’œuvre devraient augmenter dans les années à venir. Cet afflux est donc "une chance énorme, cette nouvelle vague d’immigrés est plus jeune et mieux formée", a ainsi déclaré la ministre du Travail, Ursula von der Leyen.

Mais faire tourner l’économie allemande, c’est aussi freiner celles des pays du sud. En attirant les diplômés et les futures élites d’Espagne, de Grèce ou d’Italie, Berlin fait "mécaniquement chuter les chances de ces pays de trouver une issue", note le site français d’information Mediapart.

Sans compter que derrière la vitrine attractive de l’eldorado allemand se cache aussi de fortes désillusions. Diplômés ou non, "les perspectives pour ces nouveaux arrivants sont limitées. Leur chance sur le marché du travail ne sont pas bien meilleure qu’en Grèce, par exemple", confiait déjà en 2011 Pigi Mourmouri, une assistante sociale allemande interrogée par FRANCE 24. Pour bon nombre de jeunes migrants grecs ou espagnols, "il faut souvent se contenter de postes précaires ne correspondant pas à leurs qualifications", note encore Mediapart.

FRANCE 24 avec dépêches