Une commission d'enquête mandatée par l'ONU indique ne pas avoir de preuve formelle de l'utilisation de gaz sarin par les rebelles syriens. Un désaveu pour la magistrate Carla del Ponte, qui a affirmé le contraire, dimanche.
La Commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie mandatée par l’ONU indique n’avoir "pas obtenu de résultats permettant de conclure" à l’utilisation d’armes chimiques en Syrie. "En conséquence et à ce jour, la Commission n'est pas en mesure de commenter davantage ces allégations", précise un communiqué publié ce lundi.
Un texte qui sonne comme un désaveu de Carla del Ponte, la procureure suisse elle-même membre de cette commission, qui a évoqué dimanche sur la Radio suisse italienne des témoignages faisant état de l’utilisation de gaz sarin - un gaz mortel inodore et invisible - par les rebelles syriens. Elle avait parlé de "forts soupçons, de soupçons concrets" et estimé que ce n'était pas "surprenant" que les rebelles aient utilisé du gaz sarin "car des combattants étrangers se sont infiltrés parmi les opposants".
Le président de la Commission d'enquête, le juriste brésilien Paulo Sergio Pinheiro, "rappelle à toutes les parties au conflit que l'utilisation d'armes chimiques est prohibée en toutes circonstances en vertu du droit international humanitaire coutumier", poursuit le communiqué.
Les États-Unis n'ont pas de preuve non plus
Aux États-Unis, un diplomate a lui aussi désavoué les propos de Carla del Ponte, indiquant que Washington ne disposait pas d’éléments suggérant que les rebelles avaient la capacité ou l’intention d’utiliser du gaz sarin.
Les déclarations de Mme del Ponte avaient étonné les spécialistes de ces questions. "Les affirmations de Mme del Ponte sont surprenantes car nous ne pensons pas que la Commission d'enquête dispose de preuves pour les soutenir. Dans le débat très controversé sur l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, c'est simplement irresponsable de la part d'un haut responsable de l'ONU d'avancer de telles affirmations sans une base factuelle solide", a ainsi déclaré à l'AFP sous couvert d'anonymat un expert des droits de l'Homme.
Les équipes de la Commission d'enquête, mandatée depuis 2011 par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, n'ont jamais reçu le feu vert de Damas pour entrer en Syrie. La Commission mène donc ses enquêtes en se rendant notamment dans les pays voisins de la Syrie, où ses enquêteurs interrogent des réfugiés, des victimes et des médecins, notamment.
Paris demande à Damas de laisser les enquêteurs travailler
itÀ Paris, le ministère des Affaires étrangères a appelé Bachar al-Assad à accepter la présence d'une mission de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) chargée d'apporter les "preuves irréfutables permettant de confirmer l'emploi" d'armes chimiques. "Cette enquête ne pourra en effet être crédible que si elle porte sur toutes les allégations d'emploi, et pas uniquement sur celles portées par le régime, à l'encontre de l'opposition", a indiqué le Quai d'Orsay lors d'un point presse électronique.
"Pour cela, la mission doit avoir une totale liberté de mouvement et pouvoir se rendre en tout lieu qu'elle jugerait nécessaire d'inspecter", a poursuivi le ministère. "Si le régime de Bachar al-Assad ne revient pas sur sa décision, il portera l'entière responsabilité de l'échec de cette mission et aura donné une nouvelle preuve de sa duplicité."
Le régime de Bachar al-Assad et les rebelles se sont mutuellement accusés d'avoir employé des armes chimiques à trois reprises : en décembre près de Homs, puis en mars près d'Alep et de Damas.
Avec dépêches