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Les familles des otages français d’Aqmi luttent contre l'oubli

Au lendemain d'un message d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) accusant Paris de bloquer les négociations, les familles des otages français retenus en Afrique font entendre leur voix contre l’oubli.

"On ne les oublie pas, on crie bien qu'on ne les oublie pas. On garde espoir, ça permet de garder espoir d'avoir un contact, d'entendre un contact", explique, dans des images d'agence, Pascale Robert, la mère de Pierre Legrand, enlevé depuis plus de deux ans au Sahel. À la souffrance de l’absence de l’être cher, s'ajoute l’impuissance. Pour les familles des otages français aux mains d’Aqmi en Afrique, le pire, c’est l’oubli.

Briser le silence

Mercredi 26 décembre, les familles des otages français ont été rassurées d’entendre le message des ravisseurs d’Aqmi. Les membres du groupe islamiste ont, en effet, posté une vidéo sur YouTube dans laquelle ils imputent à Paris la responsabilité de l'échec des négociations pour la libération des quatre otages français enlevés en septembre 2010 au Niger. Un message envoyé en guise de réponse à l'appel lancé le 24 décembre sur Internet, par frère de Pierre Legrand, exaspéré de ne rien voir bouger.

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Déclarations de Mireille Blain, porte-parole de la famille Legrand.

Alors que certaines familles attendent le retour de leur proche depuis une dizaine de jours, d’autres cochent le 1200e jour de détention sur leur calendrier. Pour beaucoup d’entre elles, l’attente fait très vite place au désarroi. "Je vis dans l'angoisse. Je n'écoute plus la radio, ne regarde plus la télé, je ne sais pas dans quel état il est", raconte Anne-Marie Collomp, épouse réunionnaise de Francis Collomp, enlevé le 19 décembre au Nigeria. Et d’ajouter, "le Quai d'Orsay nous dit qu'il s'en occupe, de ne pas nous inquiéter mais nous sommes loin et nous n'avons aucune nouvelle".

Organisés en comité de soutien, certains membres de familles n’hésitent plus à interpeller publiquement l’État français et les ravisseurs eux-mêmes. "Je m'adresse aux personnes qui ont du pouvoir dans cette négociation, du pouvoir dans la libération, de faire tout leur possible pour accélérer les choses et pour que la libération arrive le plus vite possible" insiste Alain Legrand, le père de Pierre Legrand.

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François Hollande, "Nous sommes chaque jour mobilisés pour la libération de nos otages."
Les familles des otages français d’Aqmi luttent contre l'oubli

Hollande assure que le gouvernement est mobilisé

Jeudi 27 décembre, le lendemain du message vidéo d’Aqmi diffusé sur le site mauritanien d'informations Sahara Médias, François Hollande est monté au créneau pour rappeler qu'il ne faut pas donner de "crédibilité" à la parole des ravisseurs des otages français en Afrique. "Moins on en dit, mieux c'est, on peut travailler."[…] Des contacts, il y en a, et ce n'est pas la parole des ravisseurs qui peut être aujourd'hui la parole crédible", a expliqué le chef de l'État. Il a aussi assuré que le gouvernement était "mobilisé" sur cette question. "Il l'est tous les jours et depuis sept mois", a-t-il précisé, avant d’ajouter que "la question des otages a toujours été traitée au plus haut niveau". 

Les négociations à huis clos

Les négociations entre ravisseurs et autorités sont à huis clos et les familles en sont exclues. "Pour mener des négociations, il faut s'appuyer sur des réseaux, des personnes fiables et cela prend beaucoup de temps." Les intermédiaires "négocient aussi leurs propres avantages, donc ça rend les choses très compliquées", résumait cette semaine sur la radio RTL Pierre Camatte, ex-otage d'Aqmi.

Au quotidien, le centre de crise du Quai d'Orsay est amené à gérer parfois des critiques sur un manque de transparence. "Le lien est permanent, le jour, la nuit, avec les correspondants" des familles, se défend-on au ministère. "Chaque fois qu'il y a des éléments nouveaux, le centre les appelle", précise-t-on, en se targuant d'avoir un service qui en "fait beaucoup" par rapport à d'autres pays dans le monde. 

Les familles "font ce qu'elles veulent" sur la communication, à la condition toutefois qu'elle s'effectue de "façon responsable, sans compliquer davantage les choses", assurent les autorités. Jusqu'à présent, elles sont "assez lucides" et agissent "en parfaite intelligence" avec les fonctionnaires chargés de leur dossier, toujours prévenus au préalable, selon ces sources.