Alors que les communications internet et téléphoniques sont coupées en Syrie, de violents combats ont lieu autour de l’aéroport de Damas, une zone stratégique pour les deux parties. Certains opposants évoquent un affrontement décisif.
L'armée syrienne a lancé, jeudi, une vaste offensive à l'est de Damas, sur la route de l'aéroport. La route a été coupée et plusieurs compagnies aériennes ont décidé d’annuler leurs vols. Un porte-parole des rebelles a expliqué à Reuters que les rebelles entendent prendre le contrôle de l'aéroport où, selon leurs informations, atterrissent des appareils civils transportant des armes destinées au régime en place.
Ces dernières semaines, les rebelles ont multiplié les attaques à Damas et dans ses faubourgs. Celles lancées dans la matinée ont été les plus violentes enregistrées dans la région depuis mars 2011, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Fabrice Balanche, chercheur spécialiste de la Syrie et directeur du Groupe de recherche sur la méditerranée et le Moyen-orient pense que ces affrontements autour de l’aéroport de Damas sont à relier avec l’attentat qui a frappé le quartier de Jaramana, mercredi, coûtant la vie à plus de 50 personnes. C’est la quatrième fois que cette localité du sud-est de la capitale, principalement peuplée par des druzes et des chrétiens, est ciblée par des attentats.
Fabrice Balanche explique à FRANCE 24 que Jaramana est stratégique car elle se trouve précisément sur la route de l’aéroport. "La rébellion veut s’en emparer pour pouvoir isoler Damas, la couper de l’aéroport et affaiblir ainsi le régime, explique-t-il. Les rebelles ont tenté, à plusieurs reprises, de prendre la localité mais elle résiste car, contrairement aux quartiers environnants, la population issue des minorités n’est pas favorable à la rébellion", poursuit-il.
Le chercheur explique "que, en ciblant à plusieurs reprises Jaramana par des attentats, les rebelles tentent de pousser les habitants à fuir pour pouvoir dominer le quartier".
"Nettoyer la périphérie de Damas"
Selon une source de sécurité, l'armée a mobilisé d'importants renforts pour maintenir son contrôle sur la capitale. "Le régime semble mettre les bouchées doubles pour la défense de Damas, l’idée étant de nettoyer la périphérie de la capitale sur un rayon de 10 km environ", estime Frédéric Pichon, docteur en histoire et spécialiste de la Syrie, joint par FRANCE 24.
Selon une autre source, un diplomate en poste à Damas cité par l’AFP, cette bataille pour le contrôle de la route de l’aéroport a pour enjeu d’isoler la rébellion dans les régions rurales qu’elles tient au sud et à l’est de la ville. "Le régime, quant à lui, veut préserver le pays utile, les grandes villes, en lâchant ce qu’il juge inutile", explique Frédéric Pichon.
Au même moment, une grande partie du pays était coupée du monde, sans téléphone ni Internet, les militants accusant le régime de préparer un "massacre" tandis que, selon les autorités, des "travaux de maintenance" expliquent cette panne.
L'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty International a estimé que cela "pourrait annoncer l'intention des autorités syriennes de dissimuler aux yeux du monde la vérité de ce qui se passe dans le pays". Selon Fabrice Balanche, les autorités syriennes ont pu agir de la sorte pour dissimuler les mouvements de leurs troupes autour de Damas.
Jeudi, selon un bilan provisoire, 69 personnes, dont 34 civils, ont péri en Syrie, selon l'OSDH, qui a recensé plus de 40 000 morts depuis le début, en mars 2011, d'une révolte populaire qui s'est militarisée face à la répression brutale du régime.