À l’occasion de l’Assomption, le cardinal André Vingt-Trois a envoyé à ses fidèles un plaidoyer sous forme de prière contre la légalisation du mariage homosexuel. FRANCE 24 est allé à la rencontre de catholiques pour recueillir leurs réactions.
Les portes de l’église Sainte-Geneviève des Grandes-Carrières dans le 18e arrondissement de Paris sont grandes ouvertes en ce jour de l’Assomption. L’enfant de chœur, posté devant l’entrée principale, distribue un tract inhabituel aux paroissiens. Flanqué du logo du diocèse de Paris, la petite feuille bleu ciel (voir photo) est une prière universelle spécialement écrite à l’occasion de cette fête de l’Assomption.
L’auteur de la prière n’est pas nommé mais les paroissiens n’ignorent rien de son contenu, ni de son rédacteur. Tous ont entendu parler par les médias de la polémique qu’a suscité la lettre rédigée par la plume du Cardinal André Vingt-trois contre le mariage homosexuel.
La prière, consignée en quatre points, invite à plus de compassion et de générosité "envers les victimes de restrictions diverses et qui voient l'avenir avec inquiétude". Elle appelle à prier pour "ceux qui ont été récemment élus, pour que leur sens du bien commun de la société l'emporte sur les requêtes particulières". Pour "que les familles en attente légitime d'un soutien de la société ne soit pas déçues", et "pour que les enfants cessent d'être les objets des désirs et des conflits des adultes pour bénéficier pleinement de l'amour d'un père et d'une mère".
"Les paroissiens et moi-même attendions un message de notre évêque"
Dans la sacristie, on se prépare à la messe dans une ambiance sereine. Deux minutes avant le début de l’office, le Père Thierry Vernet n’a toujours pas enfilé son aube mais il accepte volontiers de dire quelques mots. "Les paroissiens et moi-même attendions un message de notre évêque parce qu’on sent qu’il y a un malaise par rapport à tout ce que l’on peut entendre au sujet du mariage homosexuel. Nous lirons la prière de Monseigneur Vingt-Trois au cours de la prière universelle. Son message clair va nous aider." Du côté des paroissiens, qui arrivent un par un dans l’église de la rue Championnet, on comprend la position politique du cardinal mais les avis restent très partagés.
Arrivée en avance, Lucienne, une fidèle de la paroisse, profite des rayons du soleil avant de rentrer dans l’église. Calme et souriante, la paroissienne se dit parfaitement en accord avec le message d’André Vingt-Trois. "Dieu a créé l’homme et la femme. Je ne vois pas pourquoi deux hommes ou deux femmes devraient s’unir. Je prie depuis longtemps pour qu’on ne légalise pas le mariage homosexuel et je suis très inquiète à ce sujet." Tous les avis des fidèles ne sont pas aussi tranchés.
Huguette, 65 ans, plaide en faveur de la légalisation du mariage homosexuel. "Il ont le droit d’avoir une vie de famille comme les autres, c’est incontestable." Avant de modérer son discours. "Ce qui me gène davantage, c’est l’adoption d’enfants. Je comprends parfaitement que deux hommes ou deux femmes aient envie d’avoir un enfant mais ce choix peut quand même s’avérer délicat pour l’enfant. En ce qui concerne le message de Monseigneur Vingt-Trois, c’est normal, il fait son métier. On n’est pas obligé d’être d’accord mais on ne peut pas attendre de lui un autre discours. C’est à chacun de faire appel à sa conscience pour juger de ce qui est bien ou mal." Martin, un jeune homme d’une vingtaine d’années, avoue n’être ni pour ni contre. "Le plus important, c’est qu’un enfant puisse bénéficier d’une bonne éducation et de l’amour de ses parents quelle que soit leur sexualité." Il tient cependant à ce que la distinction entre politique et religion soit clairement établie. "Je ne pense pas que ce soit le rôle de l’Église de prendre partie dans le débat du mariage civil pour les homosexuels. Que l’Église s’occupe de nos âmes, et le gouvernement de nos lois."
Si certains n’éprouvent aucune difficulté à se déclarer en faveur du mariage et de l’adoption par des couples gay, ils ne souhaitent pas pour autant que l’Église célèbre leurs unions. Pour Alexandrine, une jeune femme d’une trentaine d’années, "qu’un couple homo se marie devant le maire est une chose, mais se marier devant Dieu, ça, en est une autre."
Avant que les portes ne se referment pour le début de la messe, une vieille dame avoue son incapacité à prendre position sur la question. "Mais ce qui est sûr, assure t-elle, c’est que nous allons prier fort pour que nos dirigeants prennent les meilleures décisions."