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La rencontre entre le roi Abdallah et Al-Assad cruciale pour la région

Le roi Abdallah reçoit, ce mercredi, le président syrien et l’Égyptien Hosni Moubarak. Une rencontre qui marque un tournant dans les relations entre l’Arabie saoudite et la Syrie, en froid depuis l’assassinat du Libanais Rafic Hariri.

Avec cette rencontre, l’Egypte et l’Arabie saoudite, chefs de file des puissances arabes modérées, tendent la main à la Syrie, le principal allié arabe de Téhéran, et soutien déclaré du mouvement chiite libanais Hezbollah et du Hamas palestinien.


Pour Frédéric Encel, spécialiste du Proche-Orient, enseignant à l’Institut d’études politiques (IEP) de Paris et auteur notamment d’"Horizons géopolitiques" (Seuil), cette invitation constitue un véritable "geste" de la part du royaume wahhabite, tout en rappelant que les "deux poids lourds sunnites que sont l’Egypte et l’Arabie saoudite ont soutenu l’offensive israélienne sur Gaza en dénonçant le Hamas."


Selon lui, les dirigeants égyptien et saoudien cherchent une alternative à la situation actuelle dans la région, où la division des pays arabes laisse une porte ouverte à l’Iran. "Ils veulent imaginer un front arabe contre les prétentions nucléaires iraniennes et c’est pour eux le moment de convaincre Damas de modifier sa politique dans la région", explique-t-il.


Selon des sources diplomatiques saoudiennes, les trois dirigeants devraient aborder des problématiques régionales afin de préparer le sommet de la Ligue arabe prévu le 30 mars à Doha (Qatar).

Mais la rencontre d'aujourd'hui marque un réel tournant dans l’équilibre des forces dans la région. Nabil Mouline, spécialiste de l’Arabie saoudite et chercheur à l’IEP de Paris, explique que ce geste s’inscrit dans la continuité du sommet de la Ligue arabe au Koweït le 20 janvier dernier, en marge duquel les puissances arabes avaient opéré un rapprochement. "La Syrie a montré lors du sommet du Koweït, sa volonté de revenir dans le giron des pays arabes", remarque Nabil Mouline. Dans un contexte de guerre à Gaza, Saoudiens, Egyptiens et Jordaniens, hostiles au Hamas, s’étaient entretenus avec les Syriens et les Qataris, qui eux le soutiennent. Cette rencontre avait été saluée par les analystes, comme une "réconciliation arabe".


"C’est tout l’équilibre de toute la région qui est en jeu"


Ce sommet tripartite intervient moins d’une semaine après la visite de deux émissaires américains à Damas. Une première depuis 2005.


L’administration Obama a émis le souhait de se reprendre le dialogue avec la Syrie. Les Etats-Unis seraient les premiers à applaudir un rapprochement de Damas avec les puissances arabes modérées vu la situation clé du pays et son rôle stratégique dans la région.


"Pour les Etats-Unis, l’Egypte et l’Arabie saoudite, la stabilisation de l’Irak passe par le dialogue avec la Syrie, déclare Nabil Mouline. On sait que c’est le passage obligé des djihadistes, et des armes, en direction d’Irak, mais aussi du Liban et de Gaza", ajoute-t-il.


Pour lui, il est peu probable que le régime syrien cesse tout contact à court terme avec ces organisations, mais "l’influence qu’il a sur elles est énorme, rappelle-t-il. Damas peut déjà les calmer, il ne faut pas oublier que la Syrie est le ‘siège-bis’ du Hezbollah et du Hamas."


Frédéric Encel observe, lui, que Barack Obama a rompu avec la politique de l’administration Bush qu’il considère comme "une politique du bâton exclusif, qui n’a pas fonctionné. Ils allient maintenant le bâton à la carotte pour pousser la Syrie à quitter le giron iranien. Outre l’Irak, où la situation s’est calmée, les Américains aimeraient voir la Syrie cesser ses ingérences dans la politique du Liban notamment", analyse-t-il.

C’est donc bien "l’équilibre de toute la région qui est en jeu", conclut Nabil Mouline.