, envoyé spécial à Rio de Janeiro – À quelques heures du début de la conférence Rio+20 sur le développement, le Brésil est parvenu à obtenir un accord à l’unanimité sur une proposition de déclaration finale. Un "échec colossal" pour la société civile.
Le Brésil, qui tenait absolument à boucler un projet de déclaration finale avant l’arrivée des chefs d’État et de gouvernement, mercredi, a obtenu mardi midi, à l’arrachée, l’accord des délégués des 193 États membres de l’ONU. Les séances de travail à marche forcée ont abouti à un texte de 49 pages intitulé "l’avenir que nous voulons". Il doit être signé vendredi soir, à la clôture de la conférence de l’ONU Rio+20 sur le développement durable.
Le texte est considérablement allégé comparé aux 81 pages qui étaient encore en discussion vendredi soir. "Les attentes des pays en développement ont été prises en compte dans la déclaration", a déclaré Luiz Alberto Figueiredo Machado, ambassadeur du Brésil à Rio+20. Le secrétaire général de la conférence, Sha Zukang, a annoncé dans un communiqué : "les négociations ont abouti à une conclusion réussie. Nous avons maintenant un texte qui sera adopté à la conférence."
Il n’y a pas eu d’accord sur la question de l’"économie verte", le document laissant une marge de manœuvre dans la mise en œuvre de ce principe. "On a été prudents, la définition n’est pas parfaite. Le principe n’a pas à être adopté en tant que tel", explique le porte-parole de la délégation brésilienne. Autre point qui n’a pas véritablement abouti : la création d’une agence onusienne de l’environnement, défendue par la France. Le programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) serait simplement renforcé et développé ; ce point doit être évoqué à l’Assemblée générale de l’ONU, en fin d’année.
La société civile parle "d’échec colossal"
L’optimisme des diplomates brésiliens n’est pas partagé par tous dans les couloirs du Riocentro, immense parc des expositions situé à 30 km à l’ouest de Rio de Janeiro. De nombreuses ONG ont vigoureusement réagi à la proposition de déclaration. "Le texte dans sa version actuelle est un échec colossal de leadership et de vision de la part des diplomates. Ils devraient avoir honte de leur incapacité à trouver un terrain d’entente sur une question aussi cruciale" que celle du développement durable, a réagi Jim
Leape, directeur général du WWF International.
Même son de cloche du côté de Greenpeace : "Rio+20 s’est transformé en échec épique. Cela a échoué sur l’équité, échoué sur l’écologie et échoué sur l’économie. (…) C’est le dernier souhait et testament du modèle de développement destructif du XXème siècle", constate Kumi Naidoo, directeur exécutif de Greenpeace International.
Vers la simple préservation des acquis de 1992 ?
Certains voudraient tout de même voir dans Rio+20 une part de réussite, quelle qu’en soit l’issue. "Nous aurions souhaité un texte plus ambitieux mais il marque des jalons et permettra d’avancer encore", a déclaré Nicole Bricq, ministre française de l’Écologie. "Certes, il y aura beaucoup moins de résultats qu’à la première conférence de
Rio, mais les participants sont beaucoup plus conscients des enjeux", a expliqué Bettina Laville, qui avait coordonné la participation française à la conférence de Rio en 1992.
Une crise de dernière minute n’est pas impossible. Plusieurs délégués envisagent de bloquer le texte s’il n’est pas renforcé. Les cartes sont maintenant entre les mains de la présidente brésilienne Dilma Rousseff qui va prendre la direction du sommet dont seront absents plusieurs dirigeants occidentaux, parmi lesquels Barack Obama, David Cameron et Angela Merkel. François Hollande est attendu mercredi à Rio. Il doit prononcer un discours en session plénière mais s’expose à une lourde déception. La plus grande conférence jamais organisée par l’ONU pourrait n’aboutir qu’à la préservation des acquis du premier Sommet de la Terre plutôt qu’à leur dépassement.