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Le Royaume-Uni peut-il séduire les entrepreneurs français?

Le Premier ministre britannique, David Cameron, incite les entreprises françaises à chercher un ciel fiscal plus clément au Royaume-Uni. L’avenir serait-il si sombre pour les entreprises en France ?

Tapis rouge ou carton rouge ? L’appel du pied du Premier ministre britannique David Cameron aux entreprises françaises qui seraient tentées de fuir la France pour des raisons fiscales n’est pas passé inaperçu au premier jour du G20 au Mexique. “Nous déroulerons le tapis rouge aux entreprises françaises, qui paieront ainsi leurs impôts au Royaume-Uni”, a assuré le chef de gouvernement britannique, se réjouissant au passage de la contribution de ces exilés fiscaux au financement des écoles et des services publics britanniques. Il a rappelé que son gouvernement avait,lui, en mars 2012, décidé de baisser l’imposition des plus riches.

Michel Sapin, le ministre français du Travail, a pris ces propos à la légère. “Je ne

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Michel Sapin ne tarde pas à répondre à David Cameron
Le Royaume-Uni peut-il séduire les entrepreneurs français?

sais pas comment on fait pour dérouler un tapis rouge au travers la Manche sans qu’il prenne l’eau”, a-t-il ironisé mardi 19 juin. Plus sérieux, le ministre des Affaires européennes, Bernard Cazeneuve, a brandi “le patriotisme des patrons” français qui ne se laisseraient pas séduire par les sirènes britanniques.

Entre bourde diplomatique et provocation, la sortie de David Cameron ravive un spectre qui avait beaucoup animé la campagne électorale en France : celui d’une gauche qui serait hostile au monde des affaires et aux riches. À l’appui de son constat d’un désir supposé d’exil, le Premier ministre britannique a cité le fameux “taux de 75 % pour la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu”.

Cette proposition avait déjà provoqué un tollé à la City de Londres lorsque le candidat Hollande l’avait énoncé pour la première fois le 26 février 2012. Deux jours plus tard, le futur Président français avait même tenter de rassurer le monde des affaires et de la finance à Londres en affirmant “I’m not dangerous”.

Hausse programmée

Mais ce controversé super taux d’imposition ne concerne pas la fiscalité des entreprises. Cette dernière devrait cependant s’alourdir si l’on s’en tient au programme de François Hollande. Mais le tableau est-il réellement assez noir pour justifier un exode tous azimuts sous le soleil fiscal britannique ?

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David Cameron se dit prêt à "dérouler le tapis rouge" aux entreprise françaises

Le premier test devrait intervenir début juillet avec le projet de loi de finances rectificative. Les entreprises devraient alors faire les frais de l’augmentation programmée des recettes via des hausses de certains prélèvements et la création de nouvelles taxes. Certains héritages de l’ère Sarkozy, comme la defiscalisation des heures supplémentaires ou la TVA dans la restauration, devraient soit être supprimés soit être redéfinis.

Durant la campagne présidentielle, François Hollande avait également prévenu que les bénéfices de certains groupes, comme les banques ou les compagnies pétrolières, allaient être soumis à une contribution “exceptionnelle”.

Enfin, le quotidien économique français "Les Echos" affirme, mardi 19 juin, que le gouvernement prépare un prélèvement à la source de 3 % sur les dividendes versés par les sociétés à leurs actionnaires. Il s’agirait de donner corps à un autre credo de campagne des socialistes : inciter les entreprises à investir plutôt qu'à récompenser leurs actionnaires. Cette mesure rapporterait 800 millions d’euros par an à l’État d’après le calcul des "Échos". Elle risque cependant “d’inciter à investir ailleurs”, d’après Laurence Parisot, la patronne du Medef.

Mesures incitatives

Un ensemble de mesures qui semble en effet lourd de conséquences pour la trésorerie des entreprises. Mais la plupart de ces propositions visent en premier lieu les grands groupes et non pas les PME. La banque BNP Paribas a ainsi mesuré que la proposition de taxer les dividendes affecterait avant tout EDF, Areva ou encore Total. En outre, la fin des heures supplémentaires défiscalisées ne concerne pas les entreprises de moins de 20 salariés.

Par ailleurs, le projet présidentiel du Parti socialiste prévoit plusieurs mesures censées favoriser l’activité des petites et très petites entreprises. Outre la banque d’investissement chargé de financer les projets des PME, le PS souhaite également abaisser l’impôt sur les sociétés pour les TPE, qui serait porté à 15 % contre 33 % actuellement. Reste à savoir si, dans le contexte de crise économique actuelle, ces largesses fiscales continueront à figurer au programme du gouvernement.