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Le "semi-échec" de la mission d’observation de l'ONU en Syrie

L’ONU fait le point mardi sur sa mission d’observation en Syrie, interrompue par l'intensification des violences. Un ancien cadre des Nations unies estime que cette mission était vouée à l’échec, même s’il veut en retenir des aspects bénéfiques.

Un échec sur toute la ligne ? Le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit mardi 19 juin pour auditionner le responsable de sa mission d’observation en Syrie, le général Robert Mood, afin de faire le point sur ses deux mois passés dans le pays. En charge de superviser les 300 observateurs déployés en Syrie, Robert Mood a décidé, le 16 juin, que la Misnus (Mission de supervision des Nations unies en Syrie) ne pouvait pas aller au bout de son mandat, fixé au 20 juillet, en raison de "l'intensification des violences"

"Force est de constater que c’est un semi-échec", concède Yves Berthelot, ancien secrétaire général adjoint des Nations unies. Contacté par FRANCE 24, ce spécialiste des missions de maintien de la paix assure que ce revers est à mettre au crédit du régime syrien, qui "n’a pas joué le jeu".  "On aurait pu espérer que les autorités veillent à ne pas paraître trop brutales devant des observateurs internationaux. Mais malheureusement, le régime n’a pas mis un terme à sa répression, il l’a même renforcée, faisant fi de la mission de l’ONU, se désole-t-il. Ainsi, la mission n’est pas parvenue à son objectif principal : apaiser la situation dans le pays en vue de préparer des discussions entre les deux camps."

Pendant plus de deux mois, les observateurs de l’ONU ont en effet été confrontés à une situation de quasi-guerre civile sur le terrain. Les violences n’ont jamais cessé, malgré les injonctions des Nations unies et notamment de sa haut-commissaire aux droits de l'Homme, Navi Pillay, qui est allée jusqu’à accuser Damas de crimes contre l'humanité.

Une mission "vouée à l’échec" mais "nécessaire"

La résolution de l’ONU sur l’envoi d’observateurs en Syrie avait été emportée de haute lutte en avril, la Chine et la Russie s’étant tout d’abord opposées au projet. Mais dès le lancement de la mission, nombreux ont été les spécialistes à souligner la difficulté de l’entreprise pour Robert Mood et ses observateurs.

"C’était une mission très délicate car inédite dans sa forme. Les observateurs n’étaient pas en charge de contrôler une zone de démarcation entre deux camps, car les violences touchent l’ensemble du territoire syrien", rappelle Yves Berthelot. Celui-ci estime que la situation chaotique sur le terrain mettait également en danger la sécurité des observateurs. "Normalement, le pays qui accueille une mission est en charge de la protection des membres de l’ONU. Mais là encore, le régime n’a pas collaboré, c’était voué à l’échec dès le début."

L’ancien cadre de l’ONU veut tout de même retenir quelques aspects bénéfiques de ces deux mois de présence internationale en Syrie : "Grâce au rapport de Robert Mood, le monde entier va avoir une vision précise et objective de la situation sur le terrain. Rien que pour cela, la mission était nécessaire".

Des Casques bleus armés pour remplacer les observateurs ?

Confrontée au revers de sa mission d’observation, l’ONU va-t-elle se décider à envoyer des Casques bleus armés en Syrie, comme le réclame l’opposition au président Bachar al-Assad ? Un scénario auquel Yves Berthelot ne croit guère : "Ni les Russes, ni les Chinois, ni même la plupart des Occidentaux y sont favorables". Restent les sanctions économiques, mais leur efficacité n’est pas toujours avérée, selon lui. "Surtout, elles font souffrir autant le peuple que les dirigeants", ajoute-t-il

Quant à l’envoi d’une nouvelle mission d’observateurs, l’ancien fonctionnaire des Nations unies doute de son efficacité. "Pourquoi réussirait-t-elle là où la mission précédente a échoué ? Non, aujourd’hui, le salut n’est plus sur le terrain, mais au G20  puis au Conseil de sécurité, où les Occidentaux doivent parvenir à convaincre les Russes et les Chinois de lâcher le régime syrien." Sans avancée rapide sur le terrain diplomatique, c’est tout le plan Annan de sortie de crise qui menace de s’effondrer.

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