La Cour pénale internationale a rendu mercredi son premier verdict, reconnaissant le milicien congolais Thomas Lubanga coupable de crimes de guerre pour avoir supervisé et organisé l'enrôlement d'enfants-soldats en RD Congo entre 2002 et 2003.
Près de dix ans après sa création, la Cour pénale internationale (CPI) a rendu, mercredi 14 mars, son premier verdict à La Haye dans le procès de Thomas Lubanga, l’ex-chef de milice congolais de 51 ans.
Transféré à La Haye en 2006, cet ancien chef de l'Union des patriotes congolais (UPC) a été reconnu coupable de crimes de guerre pour avoir enrôlé des enfants-soldats au sein des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), l'aile militaire de l'UPC, entre septembre 2002 et août 2003, au cours de la guerre civile en Ituri, une province du nord-est de la République démocratique du Congo (RDC).
it"La chambre a conclu à l'unanimité que l'accusation a prouvé au-delà de tout doute raisonnable que Thomas Lubanga est coupable des crimes de conscription et d'enrôlement d'enfants de moins de quinze ans et les a fait participer à un conflit armé", a déclaré le juge britannique Adrian Fulford lors de l’audience publique à La Haye.
L’accusé, qui avait plaidé non coupable, restera en détention jusqu’à ce que les juges prononcent sa peine à une date qui n’a pas pour l’instant été communiquée. La défense a un délai de trente jours pour faire appel du jugement.
Le verdict pourrait être utilisé contre Joseph Kony
Le procureur de la CPI avait annoncé avant le début du procès qu’il requerrait une peine sévère, proche de la peine maximum de 30 ans de réclusion, à l’encontre de Thomas Lubanga. Ce procès aura duré trois ans, alors qu'il était prévu 6 à 9 mois.
Il s’agit du premier procès international consacré exclusivement au recrutement d'enfants-soldats. Le verdict tombe quelques jours après le lancement de la campagne #StopKony par l'organisation américaine Invisible Children, devenue un phénomène sur Internet, et qui a rappelé au monde l’existence de Joseph Kony. Ce dernier, inculpé par la CPI comme Thomas Lubanga, d’avoir dirigé des milices congolaises qui ont enlevé des enfants pour les forcer à devenir soldats, reste l'un des fugitifs les plus recherchés de la planète.
Ce verdict pourrait permettre d'établir des précédents juridiques utilisables contre Joseph Kony et les membres de son Armée de résistance du seigneur (Lord's Resistance Army, LRA) s'ils sont arrêtés et traduits en justice.
La CPI a dix ans
"Quand j’ai commencé, on disait que nous n’arriverions jamais à tenir un procès, se souvient le procureur Luis Moreno-Ocampo dans un entretien à l’AFP. Alors que maintenant, nous menons des enquêtes dans sept pays, nous avons des gens en prison, nous sommes un vrai tribunal."
Le chef de milice congolais Lubanga, premier visé par un mandat d’arrêt de la CPI, est emprisonné au centre pénitentiaire de la Cour avec deux autres anciens chefs de milice en RDC, Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui, poursuivis eux aussi pour leur rôle dans la guerre civile en Ituri. Sont également détenus dans le Centre pénitentiaire l’ex-vice-président de la République démocratique du Congo Jean-Pierre Bemba et l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo.
La CPI conduit actuellement quinze procédures criminelles. Toutes concernent l’Afrique, au regret de plusieurs ONG de défense des droits de l’homme. Ne disposant pas de force de police propre, la Cour doit compter sur le bon vouloir des États signataires du statut de Rome (entré en vigueur en 2002) pour obtenir l’arrêt de suspects.