
Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a rencontré, ce dimanche à Rangoun, la figure de proue de l’opposition birmane, Aung San Suu Kyi, dont la libération en novembre 2010 avait marqué le début d’une ouverture du régime birman.
AFP - Le chef de la diplomatie française Alain Juppé a assuré dimanche à Rangoun, après sa première rencontre avec l'opposante Aung San Suu Kyi, que l'Union européenne répondrait en "termes concrets" aux récentes réformes spectaculaires du nouveau gouvernement birman.
"Comme le reste de la communauté internationale, nous avons observé avec beaucoup d'attention les signes positifs du président Thein Sein, y compris récemment", a-t-il déclaré.
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"Nous répondrons, la France et l'UE, positivement et en termes concrets à ces gestes significatifs", a-t-il ajouté, sans préciser si cela pourrait concerner les sanctions.
L'UE, qui a annoncé début janvier l'ouverture prochaine d'une représentation en Birmanie, avait légèrement allégé en avril dernier ses sanctions contre Naypyidaw.
"Nous verrons comment (...) faire progresser le dispositif de sanctions au fur et à mesure que nous constaterons des progrès dans la démocratisation du régime", avait indiqué Juppé samedi en arrivant à Rangoun pour une visite historique, la première d'un ministre français des Affaires étrangères dans le pays.
La junte au pouvoir pendant près d'un demi-siècle s'est auto-dissoute et a transféré en mars dernier ses pouvoirs à un nouveau gouvernement "civil", bien que contrôlé par d'anciens militaires.
Cette nouvelle équipe a multiplié les réformes spectaculaires ces derniers mois, permettant en particulier le retour au coeur du jeu politique de Suu Kyi.
Dernier geste en date, quelque 300 prisonniers politiques, dont dissidents de premier plan.
Cette mesure a été saluée par l'Occident qui la réclamait sans relâche comme une preuve de la sincérité des réformes. Les Etats-Unis, fidèles à leur politique de "donnant-donnant", se sont même dits prêts à échanger des ambassadeurs avec Naypyidaw, sans pour autant évoquer pour l'heure une levée de leurs sanctions.
Aung San Suu Kyi a de nouveau salué dimanche les récentes réformes dans son pays, cette fois en français.
"Nous espérons que ces nouveaux développements renforceront le processus de démocratisation et la réconciliation nationale", a-t-elle déclaré après sa rencontre d'une petite heure avec le ministre français.
"Une de nos préoccupations principales est d'arriver à la fin des conflits ethniques", alors que de nombreuses minorités n'ont jamais pacifié leurs relations avec le pouvoir central depuis l'indépendance en 1948, a-t-elle insisté.
"J'ai dû travailler très dur pour lire ce texte en français, c'est donc avec soulagement que je laisse la parole à Alain Juppé", a-t-elle conclu avec un sourire radieux, sur le perron de sa maison familiale près du lac de Rangoun où elle a passé la majeure partie des vingt dernières années assignée à résidence.
Un effort remarqué par Alain Juppé, qui devait lui remettre plus tard dans la journée les insignes de commandeur de la Légion d'Honneur: "je sais que vous comprenez très bien notre langue et vous la parlez très bien, j'y vois une marque d'attention qui me touche beaucoup".
"C'est avec beaucoup d'émotion que je suis aujourd'hui à vos côtés", a-t-il ajouté avant de poursuivre en anglais pour être compris de la presse birmane.
Le ministre, qui doit rencontrer le président Thein Sein lundi, a notamment plaidé pour que les législatives partielles d'avril, qui pourraient voir pour la première fois Suu Kyi entrer au parlement, soient "libres et justes", un an et demi après le scrutin de novembre 2010, dénoncé par l'Occident comme une mascarade.
La "Dame" n'a pas exclu dimanche d'accepter un poste au gouvernement si elle était élue. "Cela dépend des circonstances et cela dépend ministre de quoi", a déclaré, soulignant qu'elle faisait "confiance" à Thein Sein.
La visite de Juppé fait suite à celles de la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton début décembre et du chef de la diplomatie britannique William Hague début janvier.