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Des dettes, une acquisition controversée et les conséquences de la catastrophe nucléaire de Fukushima du mois de mars : telles sont les raisons qui ont poussé Areva à mettre en place le premier plan social de son histoire.

Branle-bas de combat chez Areva ! Pour la première fois de son histoire, le géant français du nucléaire finira l’année 2011 dans le rouge. L’an dernier, le groupe avait échappé in extremis à des pertes de 423 millions d'euros grâce à la vente de plusieurs actifs, mais cette fois-ci, le n°1 mondial du nucléaire n’y coupera pas. Il s’apprête à boucler l’année avec un trou compris entre 1,4 et 1,6 milliard d’euros, ainsi que l’a confirmé Luc Oursel, qui a remplacé Anne Lauvergeon au poste de PDG de la société en juin dernier.

Cette mauvaise année sur le plan financier va se traduire par un plan social, un gel des investissements et une cession des actifs. Le groupe espère ainsi réaliser 1 milliard d’euros d’économie par an, et ce jusqu’en 2016, selon un communiqué publié le 12 décembre et visant à présenter les grands axes de la nouvelle stratégie d’Areva. Cette restructuration entraînera des suppressions de postes, dont 1 200 pour l’Allemagne, a confirmé Luc Oursel. Le patron du géant nucléaire a toutefois refusé de se pencher sur les conséquences pour l'emploi, alors que les syndicats assurent que plus de 1 000 postes sont en danger et que le gouvernement (actionnaire majoritaire d’Areva) jure que les salariés du groupe dans l'Hexagone n’ont rien à craindre.

Si Luc Oursel a entretenu, mardi, un flou artistique sur les suppressions d’emplois en France, il a été, en revanche, très clair sur les origines du mal d’Areva. “Depuis cinq ans, seul un tiers de nos investissements a été autofinancé. Ce n'est pas tenable”, explique-t-il dans une interview accordée au Figaro. En clair, l’actuel PDG d’Areva estime, que sous le règne d’Anne Lauvergeon, le groupe a trop emprunté pour financer son développement et qu’aujourd’hui - tel un vulgaire pays fragilisé de la zone euro - le leader mondial du nucléaire est trop endetté.

Areva ne vient pourtant pas de découvrir qu’il souffre d’un problème d’endettement. En 2010 déjà, le groupe était parvenu à diviser par deux sa dette, qui était passée de 6,2 à 3,7 milliards d’euros. Luc Oursel compte donc poursuivre cet effort, en cédant pour environ 1,2 milliard d’euros d’actifs et en diminuant le montant des investissements de 33%, par rapport à l’année dernière.

La mine de la discorde

Outre la dette, la nouvelle direction reproche également à l’ex-dirigeante de s’être égarée en rachetant, en 2007, UltraMin, une société canadienne spécialisée dans l’exploitation de gisements d’uranium en Afrique.

À l’époque, pourtant, cette acquisition semblait susceptible de permettre de faire des économies et avait été validée par le conseil de surveillance de l’entreprise - au sein duquel siégait Luc Oursel. Le cours de l’aluminium était, en effet, au plus haut et Areva voulait moins dépendre des aléas du marché en disposant de sa propre filière d’extraction. Le groupe avait accepté de payer 1,8 milliard d’euros pour cette société qui n’avait pourtant pas encore commencé son exploitation en Afrique. Le géant français a fini par se rendre compte que ses nouvelles mines contenaient moitié moins que prévu, tandis que le cours de l’uranium ne cessait de chuter. UltraMin s’est donc avéré être une mauvaise affaire et Areva a été obligé de prévoir une provision de 1,2 milliard d’euros - soit 80% du prix d’achat initial - pour couvrir de manque à gagner.

A ces erreurs, que pointe du doigt Luc Oursel, s’ajoutent les conséquences de la catastrophe de Fukushima de mars dernier. Elle “a créé une situation d'incertitude, les électriciens hésitent pour l'instant à prendre des engagements à long terme”, admet le PDG. Il regrette notamment la décision chinoise de suspendre la construction de nouvelles centrales et juge qu’il n’y aura pas de nouveaux grands projets, ces deux ans prochaines années.