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Des observateurs expriment de plus en plus de doutes sur la volonté de Damas de respecter le plan arabe, qui prévoit l’arrêt des violences. Au lendemain d’un vendredi sanglant, la répression s’est poursuivie ce samedi, provoquant plusieurs morts.

Après s’être engagé à respecter "sans réserves" le plan de sortie de crise de la Ligue arabe le mercredi 2 novembre, le pouvoir syrien aurait dû saisir l'occasion de montrer sa bonne volonté vendredi, jour de prière et de manifestations. Alors que l’organisation arabe exige la fin des violences et le retrait de l'armée dans les villes, la journée d’hier s’est conclue par la mort d’au moins 23 personnes sur l’ensemble du territoire, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), lors de manifestations appelant à la chute du régime. Ce samedi, la répression s’est poursuivie sur le terrain, où trois civils ont été tués par des tirs de blindés à Homs, ville du centre de la Syrie assiégée par l'armée et haut lieu de la contestation, rapporte l'Observatoire.

"Le sang des martyrs continue de couler"
"La situation reste très critique et n’a pas évolué à Homs après quatre jours de bombardement, explique Abou Rami al-Homsi, porte-parole du Centre médiatique de la révolution syrienne, contacté ce samedi par FRANCE 24. Nous avons entendu très tôt ce matin quatorze explosions en moins d’une heure à Bab Amro [NDLR : un quartier populaire de Homs]".
Le porte-parole, qui en appelle à la protection de la communauté internationale, estime que le régime n’a pas renoncé à commettre de "nouveaux massacres" contre les civils.
"Alors même que l’encre qui a servi à signer l’accord avec la Ligue arabe n’a pas encore eu le temps de sécher, le sang des martyrs continue de couler", regrette Abou Rami al-Homsi.
Le plan de sortie de crise de la Ligue arabe prévoit  non seulement l’arrêt total des violences mais aussi la libération des opposants, et la libre circulation des observateurs et des médias internationaux. L'ouverture d'un dialogue entre le régime et l'opposition, serait-elle déjà caduque ?
Scepticisme
"Nous avons vu la réponse sanglante du régime à l'initiative de la Ligue arabe avec l'intensification des bombardements à Homs", a déclaré Ahmad Ramadar, porte-parole du Conseil national syrien (CNS), principale force d'opposition, cité par Reuters. Dès mercredi dans un communiqué, le CNS demandait à la Ligue de geler l'adhésion de la Syrie dans son organisation. "Le comportement sanguinaire du régime montre qu'il fait fi des efforts arabes visant à arrêter l'effusion de sang et à éviter les ingérences étrangères. Le régime veut gagner du temps", argumentait le CNS.
Une réaction qui reflète le scepticisme de la majorité des opposants quant aux intentions réelles de Damas à tenir ses engagements. "Le régime du président Bachar al-Assad a visiblement accentué sa campagne de répression après la signature de l’accord avec les Arabes", déplore Hassan Abd el-Azim, coordinateur général du Comité de coordination nationale syrienne [composé de figures de l’opposition à l’intérieur de la Syrie, NDLR], joint au téléphone à Damas ce samedi par FRANCE 24. Et de poursuivre : "Nous ne pouvons pas encore parler d’échec de l’initiative arabe mais si le pouvoir ne tient pas ses engagements, il s’expose à deux choses : plus de violence et d’armes sur le terrain du côté des manifestants et une internationalisation de la crise qui peut déboucher sur une intervention militaire". Le régime portera la responsabilité de l’aggravation de la crise et ces "conséquences dangereuses", affirme-t-il.
Une méfiance également partagée par les Comités locaux de coordination (LCC), qui chapeautent la contestation sur le terrain en Syrie. Tout en saluant les "efforts de la Ligue arabe visant à arrêter l'effusion de sang des Syriens", ils affirment ne pas croire en "l'acceptation par le régime des clauses du plan".
Amnistie
De son côté, la télévision d'État a démenti les informations sur la mort de manifestants et a diffusé des images montrant des fidèles sortant des mosquées, dans le calme, après la prière du vendredi.
Parallèlement, tout en poursuivant la répression, les autorités syriennes ont promis une amnistie aux détenteurs d'armes qui se rendraient à la police dans les huit prochains jours, "si ils n'ont pas commis d'assassinats", ont affirmé, vendredi, des médias officiels. Pour Abou Rami al-Homsi, cette proposition d’amnistie est "sans valeur" puisque les protestations sont d’ordre pacifique depuis le début du soulèvement. De son côté, Washington déconseille aux Syriens de donner suite à cet appel. "Je ne conseillerais à personne de se rendre aux autorités du régime en ce moment", a indiqué la porte-parole du département d'État Victoria Nuland.
"L'administration américaine a dévoilé une nouvelle fois son intervention flagrante dans les affaires intérieures syriennes, et sa politique appuyant les assassinats et finançant les groupes armés en Syrie", a répliqué ce samedi le ministère syrien des Affaires étrangères.
Dans la journée, le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi a prévenu qu’un échec du plan de règlement de la crise en Syrie serait "catastrophique" pour le pays et pour la région. Ce dernier,  dans un communiqué publié par l’organisation panarabe, appelle le gouvernement syrien "à prendre des mesures immédiates pour mettre en œuvre le plan arabe, auquel il s'est engagé".