Agacée par la toute-puissance de la Fifa, l'Association européenne des clubs, emmenée par son porte-parole Karl-Heinz Rummenigge (photo), menace l'instance internationale de faire la "révolution". Une méthode qui a déjà porté ses fruits...
Affaires de corruption, clientélisme, procès expéditifs… La Fédération internationale de football (Fifa) exaspère de plus en plus les membres de la puissante Association européenne des clubs (ECA) et son charismatique porte-parole, Karl-Heinz Rummenigge, par ailleurs président du Bayern Munich. "Je n'accepterai pas plus longtemps d’être dirigé par des gens qui ne sont pas sérieux et propres", a déclaré, mercredi, l’ancien international allemand dans le quotidien britannique The Guardian.
"Révolution"
Soucieux de réformer un mode de fonctionnement qui, selon lui, permet d’abord aux dirigeants de se maintenir au pouvoir, le patron du célèbre club bavarois souhaiterait que "tous les actionnaires - clubs, fédérations, joueurs, arbitres et football féminin -" jouent un plus grand rôle dans le processus de prise de décisions. Une "révolution"… Mais pour beaucoup, l’intention de rendre le pouvoir à la base de l’organisation serait louable si l’ECA n’avait, en réalité, pas d’autres projets en tête.
Pas d'argent, pas de joueurs dans les équipes nationales...
Avant 2007, les membres de l’ECA étaient regroupés au sein du Forum européen des clubs, un lobby fondé par les 14 clubs les puissants du Vieux-Continent. Parmi eux, le "Big Four" anglais (Arsenal, Chelsea, Liverpool, Manchester United), l’Inter et l’AC Milan, la Juventus de Turin, le Bayern Munich, le Real Madrid et le FC Barcelone… pour ne citer que les plus importants.
En pleine campagne de qualification pour l’Euro-2008, les membres de ce "G14", alors représenté par le combatif Florentino Perez qui présidait le Real Madrid, envisageaient de retenir auprès d'eux les joueurs appelés à rejoindre leurs sélections nationales s’ils n’obtenaient aucune contrepartie financière de la part de l’UEFA, la fédération européenne. Autre projet qu’ils menaçaient de mettre à exécution : l’organisation d’un championnat indépendant disputé par les seules équipes du "G14" s’ils ne bénéficiaient pas d’un meilleur partage des revenus issus des droits de diffusion de la lucrative Ligue des champions, dont ils se disputent régulièrement le haut de l’affiche.
C’est sous la contrainte et l’insistance de Perez que le 21 janvier 2008, l’UEFA accordait au "G14" un partage plus équitable de la manne financière générée par la prestigieuse compétition. En retour, le Forum européen des clubs, devenu l’ECA, s'engageait à libérer les joueurs pour les rencontres internationales. Du moins jusqu’au 31 juillet 2014, date à laquelle prendra fin cet accord.
Une part du gâteau du Mondial
Ce samedi 30 juillet, à Rio de Janeiro (Brésil), doit se dérouler le tirage au sort des poules qualificatives pour le Mondial-2014. Ce n’est donc pas un hasard si Karl-Heinz Rummenigge a choisi cette semaine de prendre la Fifa à partie par voie de presse. L’ECA compte bien profiter de cet espace médiatique et du passage à vide que traverse la Fifa pour prendre une place plus importante dans le paysage politique du football mondial. Mais au-delà des querelles de pouvoir, c’est bien l’argent (et plus précisément une part des bénéfices du prochain Mondial) qui constitue le nerf de la guerre pour les grands clubs.
En Afrique du Sud, la Fifa a enregistré un bénéfice de 3,7 milliards de dollars mais pas un cent n’a été reversé aux clubs de football. Un manque à gagner d’autant plus regrettable que ces derniers s’emploient, saison après saison, à combler leurs déficits.