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La fondation canadienne censée apporter les garanties financières nécessaires pour maintenir le Stade Français parmi l’élite n'a toujours pas versé un centime. Le club de la capitale a porté plainte contre X pour escroquerie.

Les instances du rugby hexagonal vont-ils évincer le Stade Français du Top 14 ? Le club de la capitale, prié d’assainir ses finances, pensait avoir fait le plus dur en trouvant un repreneur. Le 7 juin, le président Max Guazzini ainsi que l’ancien ministre et sélectionneur du XV de France, Bernard Laporte, de retour dans le club de la capitale, avaient annoncé lors d’une conférence de presse qu’une fondation canadienne, la Facem Corporation, allait injecter 12 millions d’euros dans le club.

Deux semaines plus tard, patatras : les hommes forts du Stade Français, qui n’ont jamais reçu un centime de l’argent promis, font savoir qu’ils ont porté plainte contre X pour escroquerie. "Il est apparu que les documents et garanties fournis par la Facem Corporation, à l’enseigne d’une grande banque internationale, étaient des faux", explique le club dans un communiqué publié sur son site Internet.

"Une situation catastrophique"

Il y a deux semaines, les dirigeants du Stade Français pensaient pourtant avoir affaire à des gens "sérieux". Depuis que Bernard Laporte a pris contact avec les éventuels repreneurs canadiens, l’ex-sélectionneur de l’équipe de France a en effet déjà déboursé près de 170 000 euros de frais…

Mais aujourd’hui le discours a changé… "Quand les gens sont dans une situation difficile, on vous promet beaucoup d'argent mais il faut payer des frais. Alors vous payez des frais mais vous ne voyez jamais l'argent. C'est ce qui est arrivé à Bernard Laporte et ça nous met dans une situation catastrophique", a expliqué Max Guazzini ce mercredi sur Radio Notre-Dame, où il était invité pour évoquer son autre métier, celui de producteur... de musiques grégoriennes.

De son côté, celui qui se présente comme le président de la Facem Corporation, l’homme d’affaires canadien d’origine haïtienne Job Ariste, se défend de toute tentative d’escroquerie, évoquant dans une interview accordée à 20 minutes des "problèmes personnels" qui retardent son implication dans le dossier du Stade Français.

En 2006, l’Olympique de Marseille victime d’un home d’affaire canadien

Il n’y pas que le Stade français. Le Canadien Jack Kashkar, PDG d’une société pharmaceutique, avait formulé plusieurs propositions de rachat de l’Olympique de Marseille. Mais le club de football phocéen n’a jamais reçu l’argent ce qui a poussé en 2007 le président de l’époque - aujourd’hui décédé -, Robert Louis-Dreyfus a porté plainte. Le 15 juin 2011, le tribunal correctionnel a condamné Jack Kashkar à 50 000 euros d’amendes et 500 000 euros de dommages et intérêts. Le Canadien a fait appel de cette décision.

Durant ces 15 derniers jours, de nombreux doutes étaient déjà apparus sur cette fondation dont les locaux, situés dans la banlieue de Montréal, sont vides. De fait, le fonctionnement de la Facem Corporation suscite bien des interrogations. Son domaine d'activité ? Mettre en relation des investisseurs avec des entrepreneurs et reverser une partie des bénéfices dégagés dans la lutte contre l’enfance maltraitée.

Le 15 juin, le président du Racing Club de Toulon, le bouillonnant Mourad Boudjellal, s’était indigné de ce rapprochement entre la Facem Corporation et le Stade Français. "Qu’est-ce que c’est que ce groupe canadien avec cette espèce de société puante qui dit 'venez investir chez moi et les bénéfices seront reversés dans l’enfance maltraitée ?', s’était-il emporté lors d’une conférence de presse. Ils n’ont pas honte… Ça veut dire quoi ? Qu’une fois que je me suis payé, que j’ai payé tout le monde et mes notes de frais, s’il reste de l’argent, je l’investis dans l’enfance maltraitée ? Comment peut-on accepter ça en France ? Qu’est-ce qu’ils viennent foutre dans le rugby ?"

Jusqu'au 27 juin pour sauver le club

Aujourd'hui, avec le dépôt de plainte, la collaboration entre le Stade Français et la fondation canadienne semble bien compromise… Et il ne reste plus que quelques jours au club pour trouver une solution. Le 27 juin, ses dirigeants sont en effet convoqués par la Direction nationale d'aide et de contrôle de gestion (DNACG), le gendarme financier du rugby, à qui ils devront prouver qu’ils auront à leur disposition les quelque 5 millions d’euros faisant défaut. Qu’importe le prestige du Stade Français, la DNACG pourrait bien décider de rétrograder le club dans l'une des ligues inférieures.

"De nombreux clubs ont déjà été sanctionnés par le gendarme financier du rugby. L'exemple le plus marquant étant les 5 points retirés à Bourgoin en janvier dernier, ce qui a précipité sa rétrogradation en Pro D2", explique Cédric Gründler, responsable du blog "lemarketingsportif.com". "Au final, la 'course à l'armement' que se livrent les clubs de l'élite affaiblit fortement leur situation financière", décrypte-t-il.

En effet, avec l’avènement du professionnalisme, les clubs sont obligés de recruter des joueurs de plus en plus chers pour pouvoir survivre sportivement. Pour tourner la page d’une saison 2010-2011 décevante (11e sur 14), le club de la capitale a attiré des stars à l’intersaison : le Néo-Zélandais Byron Kelleher, l’Argentin Felipe Contepomi ou encore l’Australien Paul Warwick. Mais aujourd’hui, les problèmes financiers risquent d’obliger le Stade Français à revoir ses ambitions à la baisse en matière de recrutement… et en matière de résultats sportifs.