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Le président Saleh brandit la menace d'une guerre civile

Après avoir refusé dimanche de signer l'accord de transition initié par les monarchies du Golfe, le président Ali Abdallah Saleh a mis en garde l'opposition contre une guerre civile.

AFP - Le président yéménite Ali Abdallah Saleh a refusé dimanche de signer un accord sur la transition et menacé d'une guerre civile, amenant les monarchies du Golfe à suspendre leur médiation.

"Les Etats-Unis sont profondément déçus" par l'attitude de refus du président yéménite, a déclaré tard dimanche soir la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton dans un communiqué.

Un manifestant a été tué et un autre blessé sur la route de l'aéroport par des tirs de partisans du président Saleh, qui se sont déployés par centaines dans la capitale, bloquant les principales artères de la ville et faisant craindre le pire aux habitants.

M. Saleh a mis en garde l'opposition contre une "guerre civile", multipliant les conditions pour signer l'accord de sortie de crise élaboré par le Conseil de Coopération du Golfe (CCG) et prévoyant son départ dans un mois.

Réunis en soirée à Ryad, les ministres des Affaires étrangères du CCG ont annoncé avoir "décidé de suspendre leur initiative en l'absence des conditions propices" pour la réussite de leur médiation.

Cette mesure survient alors que le président Saleh a refusé dimanche de signer un accord sur une transition du pouvoir au Yémen, paraphé la veille par l'opposition et dimanche par le parti présidentiel et ses alliés en présence du secrétaire général du CCG, Abdellatif Zayani.

M. Zayani a quitté en début de soirée Sanaa pour Ryad sans avoir obtenu la signature par le chef de l'Etat de l'accord.

Le médiateur a été évacué par hélicoptère, avec l'ambassadeur des Etats-Unis à Sanaa Gerald Michael Feierstein, de l'ambassade des Emirats arabes unis où ils avaient été encerclés par des centaines de partisans armés du régime yéménite.

Les deux hommes ont assisté au palais présidentiel à la signature par des responsables du parti au pouvoir et de ses alliés -n'engageant pas le président Saleh- de l'accord sur la transition.

L'ambassadeur américain a ensuite regagné, par hélicoptère, l'ambassade des Emirats d'où il avait pu sortir en milieu de soirée avec ses homologues de Grande-Bretagne, de l'Union européenne et de pays du Golfe, après une intervention des autorités, selon un diplomate du Golfe.

Le chef de la diplomatie émiratie, cheikh Abdallah Ben Zayed Al-Nahayane, avait demandé instamment à Sanaa d'assurer la sécurité de l'ambassade et des diplomates qui s'y trouvent.

Pour protester contre cet incident, un haut responsable du Congrès populaire général (CPG), le parti de M. Saleh, Ahmed Soufane, a annoncé dimanche à l'AFP sa démission du bureau politique du parti.

Les rues de la capitale étaient vides dimanche soir à l'exception des partisans du régime armés. "Nous avons peur, la situation peut tourner à l'anarchie avec les hommes de tribus armés acheminés par le président" à Sanaa, a affirmé un habitant, Nabil Sadek.

L'opposition, qui avait signé samedi soir l'accord sur la transition, a averti M. Saleh qu'il serait "chassé du pouvoir" sous la pression de la rue s'il ne signait pas l'accord.

Les opposants à M. Saleh ont organisé sur la place du "Changement" la plus grande manifestation qu'ait connue la capitale depuis janvier pour réclamer le départ immédiat du président, selon le correspondant de l'AFP.

Quelque 1,5 million de personnes ont pris part à ce rassemblement, selon des estimations concordantes dans les milieux de l'opposition. Les manifestants ont maintenu leur sit-in en soirée, protégés par les hommes du général Ali Mohsen al-Ahmar, qui a fait défection en mars et s'est rallié aux contestataires.

Le Yémen est secoué par une contestation populaire contre le régime de M. Saleh, au pouvoir depuis près de 33 ans, accusé de népotisme et de corruption. La révolte a coûté la vie à 181 personnes, selon un décompte de l'AFP.

Le plan de sortie de crise, élaboré avec l'aide des Etats-Unis et de l'UE, prévoit la formation par l'opposition d'un gouvernement de réconciliation et la démission un mois plus tard de M. Saleh en échange d'une immunité pour lui-même et pour ses proches, puis une élection présidentielle dans les 60 jours.