Des soupçons de fraudes électorales lors des législatives - au profit du parti de l'ex-président René Préval - ont amené le nouveau chef de l'État, Michel Martelly, à demander à la communauté internationale de ne pas reconnaître les résultats.
AFP - Le président élu d'Haïti, Michel Martelly, a demandé officiellement vendredi soir à la communauté internationale de "ne pas reconnaître les résultats des législatives" entachés de fraudes au profit du parti au pouvoir. La communauté internationale était d'ailleurs sortie de sa réserve vendredi pour exiger des comptes du président haïtien sortant, René Préval, dont le parti est accusé d'avoir manipulé les résultats des législatives au risque de provoquer un regain de violence politique. "Ces résultats sont inadmissibles et ne reflètent pas la volonté populaire", peut-on lire dans un communiqué du bureau de M. Martelly. Manifestations de mécontentement Depuis jeudi matin, les partisans de candidats malchanceux manifestent violemment leur mécontentement. Des affrontements se sont produits à travers le pays, à l'exception de la capitale Port-au-Prince. Au moins un homme a perdu la vie jeudi. Vendredi, un manifestant mécontent de la défaite de son candidat a ouvert le feu sur la foule dans le centre du pays, blessant quatre personnes, a annoncé à l'AFP une porte-parole de la mission de l'ONU en Haïti (Minustah), Sylvie Van Den Wildenberg. Dans d'autres zones rurales, des routes ont été bloquées par des barrages de pneus enflammés. Des maisons ont été brûlées jeudi et un hôpital envahi par la foule en colère. Pour faire face à ces débordements, les Casques bleus de la mission de l'ONU (Minustah) sont en "alerte maximale" et "observent une vigilance soutenue", a souligné Sylvie Van Den Wildenberg. Des résultats qui suscitent des doutes sérieux Ces violences font suite à l'annonce dans la nuit de mercredi à jeudi des résultats finaux des élections à la Chambre des députés et au Sénat, manipulés par le parti Inité de René Préval, selon des diplomates étrangers et des élus locaux. "Les résultats définitifs ont (...) suscité des doutes sérieux par rapport à la transparence et la légitimité du processus qui a abouti à leur publication", dénoncent les Nations unies et les principaux bailleurs de fonds d'Haïti (Brésil, Canada, Espagne, Etats-Unis, France et Union européenne) dans un texte publié vendredi. Selon les chiffres du Conseil électoral provisoire (CEP), le parti Inité de M. Préval a amélioré de moitié sa présence à la Chambre des députés, remportant 46 sièges sur 99, et 17 au Sénat, sur 30. La formation s'est félicitée de ce score, se disant en position de force pour le choix du Premier ministre et de l'équipe gouvernementale. Relayant les doutes de M. Martelly, plébiscité avec 67,57% des voix lors du deuxième tour de la présidentielle le 20 mars, les Etats-Unis, l'ONU et les principaux donateurs en appellent à M. Préval pour faire la lumière sur les différences constatées avec les résultats préliminaires. "Les Etats-Unis appellent le gouvernement d'Haïti et le CEP à fournir une explication publique et approfondie à ce changement de résultat", a fait savoir le département d'Etat. Inité dans le collimateur des observateurs internationaux Selon des sources diplomatiques consultées par l'AFP, Inité a essayé de modifier l'issue du scrutin afin de disposer d'une majorité au Parlement et "garder le contrôle" de M. Martelly, nouveau venu sur l'échiquier politique haïtien. Inité avait déjà été dans le collimateur des observateurs internationaux au premier tour de la présidentielle. Qualifié un temps pour le deuxième tour, le candidat du pouvoir Jude Célestin avait finalement été relégué à la troisième position au profit de M. Martelly, après que des fraudes massives eurent été constatées. "Nous souhaitons une vérification indépendante qui devra vérifier si le vote du peuple a été respecté", a annoncé jeudi soir le président-élu, appelant M. Préval à ne pas entériner les résultats donnés par le CEP tant que les résultats de cette enquête n'auront pas été connus. Beaucoup s'interrogeaient toutefois sur l'issue d'une telle enquête, soulignant que la Constitution haïtienne ne prévoit aucune contestation possible une fois que le CEP s'est exprimé.
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