logo

Clandestins sans patrie dans l’océan Indien

correspondant FRANCE 24 à Bangkok – Alors que des organismes caritatifs pressent les voisins de la Birmanie de respecter leurs obligations humanitaires, les autorités thaïlandaises sont mises en cause après la disparition de boat-people birmans dans l'océan Indien.

L’affaire fait grand bruit en Thaïlande et dans les milieux de défense des droits de l’homme : la marine royale thaïlandaise aurait intercepté des centaines de réfugiés birmans sur les côtes du Golfe de Martaban, dans l’océan Indien, pour les détenir sur des îlots isolés, avant de les renvoyer et de les abandonner en haute mer, entassés sur leurs frêles embarcations, sans moteur, ni eau, ni vivres.

Les premiers témoignages recueillis auprès des réfugiés rescapés de l’ethnie musulmane des Rohingyas, échoués après des jours de dérive en Indonésie ou en Inde, font état de traitements "inhumains" infligés par les soldats thaïlandais. Ils rapportent également la disparition, en deux mois, de près d’un millier de candidats à l’exil, probablement morts noyés.

Les réfutations répétées de l’état-major, comme du gouvernement de Bangkok, qui a promis une "enquête interne", n’ont pas rassuré les sources proches de ce sombre dossier. Celles-ci rappellent que la marine thaïlandaise s’était déjà illustrée dans les années quatre-vingt, par son renvoi au large de leurs côtes de boat-people vietnamiens fuyant le régime communiste, dans une mer de Chine infestée de pirates ; non sans avoir pris soin, au préalable, de capturer les plus jeunes femmes pour les livrer aux réseaux de prostitution.

Le scandale, qui semble ternir un peu plus l’image de l’armée, tombe mal pour un jeune gouvernement dont beaucoup laisse entendre qu’il a été placé au pouvoir avec l’aval des militaires.

En dépit d’une visite finalement accordée à une agence des Nations unies auprès de quelques dizaines de ces clandestins, les autorités thaïlandaises en ont inculpé soixante-dix appréhendés samedi sur une plage de la côte ouest du pays, leur refusant le statut de réfugiés politiques.

Ces hommes qui ont tout risqué pour fuir les persécutions en Birmanie et trouver un travail en traversant une partie de l’océan Indien, font désormais l’objet d’un ordre de déportation.

Mais pour être déportés vers quel pays ? En effet, la dictature birmane ne reconnaît pas l’existence du million de Rohingyas vivant dans la région de l’Arakan, à l’extrême ouest du pays. Les autorités birmanes ont annoncé vendredi soir qu’elles refusaient le rapatriement de ces clandestins.

Bon nombre d’entre eux portaient des cicatrices et tous les symptômes de tortures infligées par l’armée birmane. L’Indonésie et la Malaisie refusent également d’accorder le statut de réfugiés aux Rohingyas.