
Le célèbre réseau social traverse une (très) mauvaise passe. Après avoir annoncé le licenciement de quelque 500 personnes travaillant sur le site, sa direction a fait savoir qu’elle lui cherchait un repreneur... Où s'arrêtera la chute ?
Frédéric Debert, 21 ans, étudiant en musique
"Je vais sur MySpace essentiellement pour découvrir de nouvelles musiques ou de nouveaux musiciens. Ainsi, lorsqu’un ami me parle d’un groupe, je suis sûr de pouvoir rapidement le trouver sur MySpace et, si besoin, d’entrer en contact avec lui.
Cela fait environ trois ans que j’ai un profil, mais je l’utilise beaucoup moins qu’avant. D’ailleurs, il y a clairement moins de monde sur le site. C’est simple : je rencontre de plus en plus de groupes qui, pour leur promotion, renvoient à leur page Facebook.
Pour moi, MySpace se résume à une utilisation à but professionnel. Je suis en train de monter un nouveau groupe et cela me permettra de le promouvoir facilement."
Rachid Hausammann, 22 ans, fondateur du studio d’enregistrement SmartAudio
"Voilà un an et demi que j’ai créé une page MySpace. Je l’ai fait parce que je pense qu’il le faut quand on travaille dans l’industrie musicale. Mais je ne l’utilise qu’une fois par semaine en moyenne. Son principal intérêt est de me permettre d'entrer en contact avec des gens de ma région et de trouver des clients potentiels.
Pour la musique, le principal avantage de MySpace sur Facebook est de proposer plus de possibilités. Sur Facebook par exemple, il est impossible de changer le fond d’une page alors que je peux le faire sur MySpace. Cela me permet de donner à mon espace un univers particulier, personnel.
C’est sûr que par rapport à l'an dernier, il y a moins de monde. Les discussions sont moins fréquentes et j’ai moins d’'amis' qu’avant."
Rupert Murdoch s’est-il lassé des difficultés persistantes de MySpace ? L’avenir du réseau social, concurrent de moins en moins sérieux de Facebook, semble en tout les cas compromis.
Mike Jones, le responsable Internet de l'empire News Corp., a en effet indiqué mercredi aux employés de MySpace qu’il cherchait un repreneur pour le site. Une annonce intervenue au lendemain de la décision prise par la direction du groupe de licencier 47 % des employés du réseau social, soit environ 500 personnes...
Il faut dire que MySpace coûte cher à son propriétaire et que l’incapacité de News Corp. à rentabiliser son bébé 2.0 commence à affecter le cours boursier du groupe. Au cours de l’année fiscale 2010, qui s’est achevée en juin dernier, les pertes du site se sont ainsi élevées à 100 millions de dollars. Et, mercredi encore, son action a perdu cinq cents à Wall Street. La comparaison avec Facebook, dont la valeur est estimée à 50 milliards de dollars contre quelque 350 millions de dollars pour MySpace, devient donc de plus en plus douloureuse.
Si l'échec semble aujourd'hui patent, il n'en a pourtant pas toujours été ainsi. Lorsque, en 2005, Murdoch avait décidé de mettre 580 millions de dollars sur la table pour racheter MySpace deux ans après sa création, tout le monde avait loué le flair du magnat des médias australien.
Retournement de situation
Pendant quelques années il est vrai, le site a tenu le haut du pavé numérique. En 2006 par exemple, il comptait plus de 100 millions de membres (contre seulement 66 millions aujourd’hui) et, en 2007 encore, Facebook évoluait dans l'ombre de MySpace. Mais ce succès a fait long feu. Un an plus tard, le réseau social fondé par Mark Zuckerberg détrônait son rival en terme de nombre de visiteurs quotidien (25 millions contre 22 millions).
Difficile de trouver une raison précise à ce retournement de situation. Peut-être MySpace - qui appartient à un grand groupe et est donc plus susceptible de souffrir des lourdeurs hiérarchiques que cela implique - n’a-t-il pas réussi à tenir le rythme de l’innovation imposé par Facebook, la petite start-up d’alors. Selon des critiques récurrentes, le site n’aurait pas réussi à mettre en place un filtre anti-spam efficace et n’aurait pas mis à jour son interface utilisateur à temps pour intégrer les dernières évolutions du web social. Autant de domaines où Facebook s’est montré, lui, plus réactif...
Quoi qu'il en soit, le coup de grâce est intervenu au mois de juillet 2009, à l'occasion du changement de logo du site. Son slogan historique, "A Place For Friends" ("Un endroit pour les amis") disparaît alors purement et simplement. De réseau social généraliste, MySpace s’autoréduit à un site de niche. Ce qui, pour News Corp., revient à accepter qu'il soit avant tout, voire exclusivement, une vitrine pour les groupes musicaux.
Reste que la niche peut être rentable. À condition de trouver un repreneur qui réussisse à jouer correctement une partition que News Corp. n’a pas su interpréter.