
Le procès tant attendu de l'ancien responsable politique congolais Jean-Pierre Bemba s'est ouvert ce lundi devant la Cour pénale internationale de La Haye. Il est accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis en Centrafrique.
Après plusieurs reports, le procès de Jean-Pierre Bemba, l’ancien vice-président de la République démocratique du Congo (RDC), s'est ouvert lundi après-midi devant la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye en présence de l'accusé, qui plaide non coupable. Il est accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis en République centrafricaine entre 2002 et 2003, par des membres du Mouvement de libération du Congo (MLC) qu'il dirigeait. "Jean-Pierre Bemba Gombo serait pénalement responsable, pour avoir effectivement agi en qualité de chef militaire" du MLC, précise la CPI.
Meurtre, torture, viols et pillages : les accusations sont très lourdes à l’égard de ce poids lourd de la scène politique congolaise qui n’a jamais cessé de clamer son innocence. Ces crimes auraient été commis en marge de l’envoi en Centrafrique de 1 500 miliciens du MLC censés appuyer le régime du président Ange-Félix Patassé, en proie à un coup d’Etat. D'après l'accusation, les combattants de Bemba avaient pour ordre de "traumatiser et terroriser" la population pour l'empêcher de soutenir la rébellion. Quelque 400 viols ont été recensés à Bangui, la capitale centrafricaine.
Un fils à papa devenu chef de guerre
- 1998 - Début de la guerre civile en République démocratique du Congo.
- 2002 - Bemba envoie ses troupes du MLC en République centrafricaine soutenir le président Ange-Félix Patassé. Les crimes qui lui sont reprochés par la CPI sont commis entre le 26 octobre 2002 et le 15 mars 2003.
- Juin 2003 - Il dépose les armes et est nommé vice-président au terme des négociations de paix.
- Octobre 2006 - Il échoue au deuxième tour de l’élection présidentielle remportée par Joseph Kabila.
- Mai 2008 - Arrestation à Bruxelles en vertu d'un mandat d'arrêt de la CPI.
Fils d’un richissime homme d’affaires proche de l'ancien dictateur zaïrois Mobutu, Jean-Pierre Bemba est né en 1962 à Bogada, dans la province de l'Equateur, près de la frontière avec la Centrafrique. Surnommé le "Mobutu miniature" et doté d’un physique imposant, il se lance après des études à Bruxelles dans le monde des affaires (téléphonie mobile, audiovisuel et fret aérien). Il devient rapidement l'un des hommes les plus riches du pays. En 1997, il quitte brusquement Kinshasa après le renversement de Mobutu et l'arrivée au pouvoir de Laurent-Désiré Kabila.
Il revient un an plus tard, après avoir fondé le Mouvement de libération du Congo, soutenu par le voisin ougandais. Il mène à partir du nord-est de la RD-C qu’il contrôle en maître, une rébellion contre le pouvoir (1998-2003).
De la présidentielle de 2006 au mandat d'arrêt pour La Haye
Nommé vice-président du gouvernement de transition dans le cadre du processus de paix en juin 2003, il endosse le costume d'homme politique après avoir déposé les armes. Très populaire à Kinshasa, il se présente aux élections présidentielles de 2006. Il échoue au deuxième tour (41,94% des voix) face à Joseph Kabila et s’engage à mener une "opposition républicaine".
Après avoir été élu sénateur en 2007, il quitte Kinshasa sous la protection d'une escorte blindée de l'ONU en avril, à la suite de violents combats entre l'armée congolaise et sa garde rapprochée. Arrêté en mai 2008 en Belgique, il est actuellement incarcéré à La Haye. "Un joli coup de filet qui permet de réaffirmer la crédibilité de la CPI", rappelait à ce moment-là, Arnaud Zajtman, correspondant de FRANCE 24 à Kinshasa. En effet, jusque-là, elle n’avait arrêté que des acteurs de second rang dans ce conflit sanglant.