Trois jours après le second tour de la présidentielle guinéenne, les premiers résultats du scrutin commencent à tomber. Selon des résultats partiels portant sur 7 % des bulletins de vote, Cellou Dalein Diallo devancerait légèrement Alpha Condé.
REUTERS - La tension monte en Guinée 48 heures après le second tour de l'élection présidentielle dont les premiers résultats partiels donnent l'avantage à Cellou Dalein Diallo sur l'opposant historique Alpha Condé.
Selon des résultats portant sur 7% des bulletins, Diallo obtient 51,7% des suffrages grâce au soutien des Guinéens expatriés qui compense un léger retard à l'intérieur du pays.
"Les résultats diffusés par la commission électorale montrent que nous sommes en tête", a déclaré mardi Foday Fofana, porte-parole de Diallo, peu après la publication des chiffres.
Avant que la commission électorale (Ceni) ne diffuse ces premiers résultats partiels, des chiffres officieux circulaient à Conakry et ont provoqué par endroit des bagarres ponctuelles.
La consultation est censée tourner la page de près de deux décennies de régime militaire dans ce pays d'Afrique de l'Ouest qui regorge de ressources agricoles et minières. Mais les analystes redoutent que l'annonce des résultats ne déclenche de nouvelles violences dans un pays très clivé au plan ethnique.
"On peut voir que les gens attendent avec nervosité les résultats", témoigne Etienne Bongoro, partisan d'Alpha Condé, dans le faubourg de Minière.
Les enjeux sont élevés dans la compétition électorale qui a opposé l'ancien Premier ministre à la figure historique de l'opposition guinéenne. Les analystes pensent que le résultat final pourrait être serré.
Comportement responsable
Aux termes de la Constitution, les résultats devaient être rendus public au plus tard mercredi mais la Ceni a fait savoir que la publication des résultats complets officieux pourrait prendre cinq jours en tout, donc jusqu'à vendredi.
Candidat du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), Alpha Condé, qui appartient à l'ethnie malinké, est arrivé en deuxième position au premier tour de scrutin, avec 18,25 % des voix. Opposant historique des deux premiers chefs de l'État guinéen, Sékou Touré (1958-1984) et Lansana Conté (1984-2008), il a déjà participé à deux présidentielles, en 1993 et en 1998. Longtemps exilé en France, incarcéré au lendemain de la présidentielle de 1998, il a été condamné en 2000 à cinq ans de prison pour "atteintes à l’autorité de l’État et à l’intégrité du territoire national", avant d’être gracié en 2001.
Leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), Cellou Dalein Diallo, issu de l'ethnie peule, est arrivé en tête du premier tour, le 27 juin, recueillant 43,62 % des suffrages. Premier ministre de décembre 2004 à avril 2006, il fut, pendant de longues années, un cacique du Parti de l’unité et du progrès (PUP) de l'ancien président Lansana Conté, avant de rejoindre l’opposition. Considéré comme l’un des principaux opposants à l'ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara, il fut grièvement blessé lors du massacre du 28 septembre 2009 à Conakry, dans lequel plus de 150 personnes ont trouvé la mort.
Tout délai supplémentaire risquerait de favoriser des accusations de fraude et d'aviver les tensions entre les deux camps, divisés selon des lignes de fracture ethniques, ajoutent ces analystes.
Il s'agissait des premières élections libres depuis l'indépendance en 1958 de cette ancienne colonie française.
Le vote s'est déroulé dans le calme, après une campagne agitée marquée par des heurts entre les deux camps politiques, faisant redouter un duel potentiellement explosif entre Peuls et Malinkés, les deux grandes communautés ethniques.
Diallo est membre de l'ethnie Peul, qui forme 40% de la population, et Condé est un Malinké, qui représente un tiers environ des 10 millions d'habitants.
Les observateurs du scrutin ont fait état d'une forte participation et n'ont signalé que des problèmes logistiques mineurs.
Ils ont toutefois mis en garde contre de nouveaux retards dans la publication des résultats et appelé au calme
"Nous encourageons les candidats à s'assurer que leurs partisans se comportent de manière responsable tout comme nous croyons qu'eux-mêmes ont un comportement responsable", a lancé mardi le général nigérian Yakubu Gowon, qui copréside une délégation du Centre Carter, lors d'une conférence de presse.