
Au Brésil, les jingles de campagne sont incontournables. Et étonnamment, quelque soit leur parti, les candidats à l'élection présidentielle d'octobre n'hésitent pas à surfer sur la popularité du président sortant.
Au pays de la samba et de la bossa, les jingles de campagne sont de véritables compositions musicales. Loin d’être des accessoires de mode, ils constituent une arme maîtresse pour les candidats, allant parfois jusqu’à servir de programme.
Et cette campagne présidentielle - le scrutin est fixé au 3 octobre - ne fait pas exception. Seule particularité : Les jingles de deux candidats, Dilma Roussef du Parti des Travailleurs (PT), et José Serra, candidat issu de l’opposition et gouverneur de l’État de Sao Paolo, exploitent en chœur la forte popularité du président sortant Luiz Ignacio Lula da Silva, alias Lula, en utilisant son nom à tout-va.
77 % des électeurs satifaits de Lula
Cela n'a rien de surprenant puisque 77 % des électeurs estiment que le gouvernement de Lula a fait un "bon" ou "excellent" travail, selon un sondage publié le 16 août par l’institut brésilien Datafollah. Seulement 4 % se disent déçus par l’action du gouvernement.
Depuis son arrivée au pouvoir en 2002, le président Lula n’a pas satisfait les attentes des membres les plus radicaux du PT en refusant d’abandonner le modèle capitaliste. Mais il a su en revanche gagner le cœur d’une immense partie de l’électorat grâce à de nombreux programmes sociaux et une bonne gestion de la crise économique.
"Lula part et Joe arrive" (le spot de campagne de Joe Serra)
Dilma Roussef, officiellement soutenue par Lula, a su convertir le bilan positif de son prédécesseur en paroles convaincantes : "Mon nouveau Brésil, le Brésil du peuple, lancé par Lula, continuera avec Dilma." Et son meilleur jingle sonne ainsi : "Elle a aidé Lula à rendre le Brésil meilleur, il est avec elle, et moi aussi."
Mais, plus étonnant, le candidat de l'opposition José Serra, surnommé Joe, a également choisi de surfer sur la "Lulamania". Son premier jingle commence ainsi : "Quand Lula da Silva s’en va, c’est José que je veux pour le remplacer", avant de se poursuivre en répétant le nom de Lula jusqu’à la fin.
Plainte devant la commission électorale
L'effet escompté n'est pas le même pour les deux candidats. Selon la première enquête d’opinion publiée par Datafollah après l’apparition de ces jingles sur les télévisions et radios nationales, José Serra perd trois points dans les sondages, chutant à 30 % des intentions de vote. Dilma Roussef peut, elle, se targuer de grimper de 6 points pour atteindre les 47 %.
"Ne t'approprie pas le travail de Lula", lance Serra à Roussef
Des résultats qui ont obligé le camp de Serra à riposter avec des spots publicitaires plus agressifs afin de réussir à dissocier l'image de Roussef de celle de Lula. "Ne t'approprie pas le travail de Lula, ce n’est pas beau et tout le Brésil regarde, tout ce que Lula a fait elle dit : c’était moi, c’était moi." Dans un autre spot télévisé, on peut voir trois images successives de Serra aux côtés de Lula pendant qu’une voix off déclare : "Serra et Lula, deux hommes historiques. Deux dirigeants expérimentés."
L’équipe de Roussef a immédiatement riposté en dénonçant la campagne "pathétique" de Serra. Dans la foulée, elle a déposé une plainte devant la commission électorale en se réferrant à l’article 54 du code électoral brésilien, selon lequel un candidat ne peut utiliser d’images d’une personne appartenant à un autre parti politique que le sien. La commission a cependant rejeté la plainte, dimanche, arguant que seule la personne concernée pouvait déposer la plainte. Le PT a annoncé qu’il ferait appel de cette décision.