Alors qu'un sondage indique que les Français sont majoritairement favorables aux mesures sécuritaires de la droite, le PS dit vouloir éviter une polémique "artificielle". Aux États-Unis, le "New York Times" n'hésite pas à parler de xénophobie.
Les propositions sécuritaires musclées de Nicolas Sarkozy, engagé dans une "guerre contre la délinquance", continuent à alimenter la polémique en France comme à l'étranger. Alors qu'un sondage de l'institut Ifop publié vendredi par "le Figaro" révèle qu'une majorité de Français soutient les différentes mesures sécuritaires annoncées par le président, le Parti socialiste assure qu'il "se prépare à répondre avec responsabilité à une situation qui s'est dégradée" et qu'il présentera un livre blanc sur la sécurité en janvier 2011. Aux Etats-Unis, le "New York Times" critique fermement, dans son éditorial, la politique migratoire de Nicolas Sarkozy.
"Sentiment d'insécurité"
Selon le sondage du "Figaro", 89 % des personnes interrogées sont "assez" ou "très" favorables au contrôle par bracelet électronique des délinquants multirécidivistes plusieurs années après la fin de leur peine, et 80 % soutiennent le retrait de la nationalité française aux ressortissants d'origine étrangère qui seraient coupables de polygamie ou d'incitation à l'excision.
Le démantèlement des camps illégaux de Roms, la condamnation à deux ans de prison des parents de mineurs délinquants coupables de "négligence" ou encore l'instauration d'une peine plancher de 30 ans pour les assassins de policiers ou de gendarmes recueillent également une majorité d'opinions favorables.
"Les électeurs de gauche sont aussi majoritairement favorables à ces mesures, précise le directeur adjoint de la rédaction du "Figaro", Yves Thréard, sur FRANCE 24. Cela ne m'étonne pas, car depuis longtemps en France le discours des hommes politiques est en décalage total avec les aspirations des Français. Ils s'adressent aux habitants du XVIe arrondissement de Paris et non à ceux de certaines villes de province ou des périphéries. Ce sentiment d'insécurité existe."
"Ce sondage a été fait complètement dans l'émotion", nuance Anne Deysine, professeure à l'université de Nanterre et spécialiste des questions politiques et sécuritaires.
"Guerre civile"
Le Parti socialiste, accusé d'incompétence ou d'angélisme sur le sujet, affirme "se préparer à répondre avec responsabilité à une situation qui s'est dégradée pour la population". "Aux provocations [de Nicolas Sarkozy], nous opposons calmement son bilan", a déclaré le secrétaire national chargé de la sécurité au PS, Jean-Jacques Urvoas, dans les colonnes de "Libération".
Il précise que "Martine Aubry ne se tait pas" et "s'est exprimée fortement". Face aux discours "aggressifs et répétitifs" de la droite, basés uniquement sur la représsion, le PS entend défendre une vision "équilibrée, articulée entre prévention, dissuasion, sanction et réparation", s'appuyant sur un "projet de transformation sociale".
L'ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard dénonce de son côté les "intentions scandaleuses" de Nicolas Sarkozy. Dans un entretien à paraître samedi dans "Marianne", il reproche au président "d'exacerber les tensions" au risque de provoquer "la guerre civile". "Je dis qu'il le paiera et qu'il l'aura mérité", affirme-t-il.
Calcul politique à court terme
A droite, le porte-parole adjoint de l'UMP, Dominique Paillé, a assuré que le sondage de l'Ifop "prouve que Nicolas Sarkozy est à l'écoute des Français".
Le ministre de l'Immigration, Eric Besson, a cependant admis que la déchéance de la nationalité en cas de polygamie sera "complexe à envisager sur le plan juridique", dans une interview au "Figaro" à paraître samedi. Il précise néanmoins qu'il présentera en septembre, dans le cadre du projet de loi sur l'immigration, un amendement pour que l'acquisition de la nationalité française "ne soit pas automatique pour les jeunes ancrés dans la délinquance".
De son côté, la députée UMP Brigitte Barèges s'est dit "loin d'être convaincue" par la condamnation à la prison des parents de mineurs délinquants. "Je crois profondément à la nécessité de la sanction, mais elle doit être réaliste et efficace", a-t-elle affirmé dans un communiqué.
Aux Etats-Unis, le quotidien "The New York Times" dénonce fermement la politique migratoire de Nicolas Sarkozy. Il "attise dangereusement les passions anti-immigrés pour des calculs politiques à court terme, dans un pays qui a longtemps défendu avec orgueil le principe d'égalité devant la loi de tous les citoyens français", juge le journal. "La droite traditionnelle, qui croit toujours [à ce principe], a raison de s'inquiéter. Et Nicolas Sarkozy ignore à tort ses conseils de prudence."