Opposition et défenseurs des droits de l'Homme dénoncent la proposition de Nicolas Sarkozy de retirer la nationalité aux personnes d'origine étrangère qui s'en prendraient aux forces de l'ordre. La majorité, elle, applaudit.
"La nationalité doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un fonctionnaire de police d'un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique". C’est ce qu’a déclaré le président français Nicolas Sarkozy, vendredi, à Grenoble, où il était venu assister à l'installation du nouveau préfet de l'Isère.
"Tout cela commence à sentir les années 1930"
"Il s’agit d’un discours parfaitement xénophobe, dénonce Michel Tubiana, président honoraire de la Ligue des droits de l’Homme. Il fait des étrangers et des personnes d’origine étrangère des boucs-émissaires de tous les maux, tout cela commence à sentir les années 1930". Pour lui, de tels discours de la part d’un président de la République risquent de "mettre en péril la paix civile".
Même réaction chez les Verts, qui dénoncent des "connotations xénophobes" et un "discours scandaleux, qui sous-entend que les tueurs de policiers seraient des personnes d’origine étrangère", mais surtout "des paroles qui ne vont pas être suivies de faits, et heureusement".
"Il ne peut pas croire lui-même à ce qu'il raconte"
"On sait que le retrait de la nationalité est une procédure très lourde, on ne retire pas la nationalité comme ça, contrairement à ce que Nicolas Sarkozy veut faire croire, réagit Djamila Sonzogni, porte-parole des Verts. Il ne peut pas croire lui-même à ce qu’il raconte pour faire oublier la crise économique et écologique, ainsi que les affaires."
De son côté, Jean-Jacques Urvoas, secrétaire national en charge de la sécurité au Parti socialiste, se dit "stupéfait". "Loin d’apporter des réponses, il ne fait qu’allumer un rideau de fumée. Je ne vois pas comment cette mesure peut répondre à la dégradation de la sécurité, tout cela ne traduit pas une maîtrise de la situation."
"Nous avons été entendus"
Si l’opposition dénonce ces propos, la majorité applaudit. Membre du Collectif de la droite populaire, qui regroupe une cinquantaine de parlementaires de l'UMP, le député du Rhône Philippe Meunier avait lui-même demandé il y a quelques jours que les délinquants naturalisés soient déchus de leur nationalité en cas de violences contre les forces de l’ordre. "Je pense que nous avons été entendus, je me réjouis des annonces faites par le président, affirme-t-il. Quand des délinquants tirent sur les forces de l’ordre, il y a un danger pour la République."
D'aucuns se demandent toutefois si ces déclarations ne sont pas destinées à reconquérir les électeurs de droite déçus par l’ouverture à gauche pratiquée par le chef de l'État français ? "Non, répond Philippe Meunier. Nicolas Sarkozy est le président de tous les Français, il n’agit pas pour raisons électorales."
"Ce discours me convient mille fois, explique de son côté le député UMP du Vaucluse Thierry Mariani, également membre du Collectif de la droite populaire. Dans le cadre de la nouvelle loi sur l’immigration dont je serai le rapporteur à la rentrée, je compte proposer le rétablissement d’une règle qui existait jusqu’en 1998 : que toute personne ayant acquis la nationalité récemment puisse être déchue en cas de peine de prison de cinq ans ferme ou plus."