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Mauritanie et terrorisme islamiste

Enquête sur la montée de l'extrêmisme islamiste en Mauritanie. (Reportage : F. Berruyer et N. Germain)

Mauritanie et terrorisme islamiste

Le rallye Dakar est annulé. Coup de tonnerre en Mauritanie, où plus de la moitié des étapes devaient se dérouler.

La veille de Noël, quatre touristes français sont assassinés au bord d'une route dans le Sud du pays, près d'Aleg, une région pourtant réputée calme. L’idée d’un crime crapuleux est d’abord évoquée avant que n'enfle la rumeur qu’il pourrait s'agir d'une action d'un groupe de militants liés à la branche maghrébine d'Al-Qaïda. Quelques jours plus tard, trois militaires mauritaniens sont tués dans le Nord dans un attentat revendiqué par Al-Qaïda.

La menace est prise au sérieux par les autorités françaises et la veille du départ du Dakar 2008, qui devait partir de Lisbonne le 5 janvier et traverser la Mauritanie, les organisateurs du rallye choisissent de l’annuler.

Pour le gouvernement du pays, cette décision est injustifiée. Cette course, grand événement de l’année, est vitale pour l’économie locale.
Abdoulaye Mamadou Bâ, porte parole de la présidence mauritanienne assure que son pays « demeure un pays sûr, malgré les meurtres isolés qui viennent de s’y produire. Je suis désolé par le fait que les autorités françaises n’ont pas eu confiance en l’assurance des autorités mauritaniennes, parce qu’annuler le Dakar, c’est donner la force aux gens qui font le terrorisme »

La Mauritanie bascule dans le terrorisme ?

A Lehleiwa, où se seraient réfugiés les trois assassins des Français, les habitants sont choqués : « Notre religion nous interdit un tel crime, on est vraiment désolés pour ce qui est arrivé, on est des bons musulmans et on prie Dieu pour qu’il nous pardonne ce crime ». Ils affirment ne rien à voir avec eux. « Ils sont tous connus comme des hors-la-loi, ils vivent dans leur cocon, mais nous, on a rien à voir avec eux. »

Deux des trois assaillants avaient déjà fait de la prison. Ils avaient été jugés responsables avec une vingtaine d’autres extrémistes de la mort de 15 personnes dans une attaque contre un camp de l’armée. Cet acte avait été considéré comme l’un premiers signes concret de l’extrémisme en Mauritanie. Ils ont tous été libérés en juin dernier, par le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, alors élu depuis trois mois.

Considérés comme extrémistes jusqu’à il y a peu, ils débattent maintenant librement à Nouakchott, la capitale. L’un deux, Abdallai Ould Aminou, a installé sa mosquée dans le quartier d’Arafat, l’un des plus pauvres de la ville où vivent la plupart des islamistes les plus radicaux.

Même si son discours s’est arrondi, il est toujours considéré comme radical et pour lui l’islamisation de la Mauritanie ne s’est pas encore assez développée.
« Ils [les Français] doivent comprendre que si quelqu’un tue une âme musulmane, alors on doit exécuter cette personne. Et si quelqu’un commet un adultère alors il doit être fouetté. Et si quelqu’un vole et terrorise les autres, alors on doit couper sa main. C’est l’un des principes des droits de l’Homme car Allah connait mieux les hommes qu’eux-mêmes ».

La Mauritanie se croyait à l’abri de ce terrorisme. Aujourd’hui, les articles sur l’extrémisme font la une des journaux du pays. Pour le directeur de l’hebdomadaire Tahalil, la question des intégristes en Mauritanie ne doit pas être éludée.

Avec deux attentats en trois jours fin décembre, la Mauritanie est devenu le dernier pays du Maghreb à être violemment frappé par les extrémistes. La situation n’est pas comparable aux pays voisins, mais la sonnette d’alarme est tirée.