Accusé d'avoir fermé les yeux sur une fraude fiscale présumée de la femme la plus riche de France, Liliane Bettencourt, le ministre des Affaires sociales a reçu le soutien du chef de l'État qui affirme ne "rien avoir à lui reprocher".
AFP - Le président Nicolas Sarkozy a pris samedi la défense de son ministre Eric Woerth, en position délicate depuis les révélations sur la situation fiscale de la femme la plus riche de France, Liliane Bettencourt, et de son ami François-Marie Banier.
"Le président de la République n'a strictement rien à reprocher à Eric Woerth. On ne peut rien lui reprocher. C'est un excellent ministre", a-t-on déclaré à l'Elysée, interrogé par l'AFP.
Fragilisé par la découverte d'enregistrements clandestins réalisés au domicile de Mme Bettencourt, l'ex-ministre du Budget, qui récuse tout conflit d'intérêt, s'est défendu vendredi d'avoir donné une instruction "de quelque nature que ce soit" pour éviter un contrôle fiscal à l'héritière de L'Oréal.
Du même coup, il a révélé avoir autorisé en 2009 un contrôle fiscal de M. Banier. Un redressement a été notifié à l'artiste qui l'a "accepté et réglé", a indiqué samedi à l'AFP son avocat Me Hervé Témime, affirmant qu'il concernait des dons "à des amis proches", "sans aucun lien avec des avoirs à l'étranger ou avec la procédure en cours" pour abus de faiblesse engagée par la fille de la milliardaire.
Le photographe doit être jugé dans ce dossier à partir de jeudi à Nanterre pour des centaines de millions d'euros de dons que lui a consentis l'héritière de L'Oréal dans les années 1990 à 2000.
C'est en lien avec cette enquête que le parquet des Hauts-de-Seine a saisi le 9 janvier 2009 l'administration fiscale "de la procédure suivie à l’encontre de François-Marie Banier et tous autres", lui transmettant "l’intégralité des éléments de la procédure et des scellés", selon le procureur de Nanterre, Philippe Courroye.
"Une chose est ce dossier (le dossier fiscal de M. Banier, ndlr), une autre est le comportement fiscal de Mme Bettencourt", a-t-on fait valoir à l'Elysée, en insistant sur le fait que "jamais aucun procureur n'avait saisi (l'administration fiscale) du dossier de Mme Bettencourt".
Depuis la révélation d'enregistrements piratés de conversations entre Mme Bettencourt et son entourage, Eric Woerth est visé par des accusations de conflit d'intérêt qu'il conteste. Ces écoutes mettent au jour des opérations pour échapper au fisc, mais aussi des immixtions de l'Elysée dans la procédure judiciaire et des liens troubles entre la milliardaire et le couple Woerth.
Salariée depuis 2007 de la société qui gère la fortune Bettencourt, l'épouse du ministre du Travail, Florence Woerth, a annoncé qu'elle allait en démissionner.
Dans ces enregistrements, il est notamment question de deux comptes en Suisse et de l'île seychelloise d'Arros, non déclarés au fisc français. Mme Bettencourt a annoncé qu'elle allait régulariser ses fonds situés à l'étranger.
Son gestionnaire de fortune Patrice de Maistre indique dans le Figaro de samedi que 78 millions d'euros étaient placés sur ces comptes en Suisse. "S'il y a eu des négligences, ce n'était pas volontaire de sa part", dit-il.
Dans un extrait de conversation du 27 octobre 2009 publié par Mediapart, il déclarait: "Il faut qu'on arrange les choses avec vos comptes en Suisse. Il ne faut pas que l'on se fasse prendre avant Noël".
A propos de l'île d'Arros, il explique au Figaro qu'elle a été "achetée en 1997 avant que je ne sois là", dit tout ignorer de "la structure de la société qui la détient", précisant que Mme Bettencourt n'en est "que locataire".
Dans un second enregistrement, daté du 23 octobre 2009, il évoquait Arros: "je n'ai pas du tout envie que l'on dise que Mme Bettencourt a une île par le biais d'une société au Liechtenstein et d'une fondation".
M. de Maistre, qui avait embauché Florence Woerth, a reçu en 2008 la Légion d'Honneur des mains de son mari.
Quant au procès de Nanterre, il risque fort d'être ajourné après la multiplication des récentes révélations.