Séisme dans le petit monde de la musique contemporaine : la Villa Médicis s'ouvre à deux artistes de la musique non-"savante", la chanteuse pop Claire Diterzi et le flûtiste de jazz Magic Malik. Une pétition circule pour s'y opposer.
AFP - L'Académie de France à Rome doit-elle accueillir comme pensionnaires des interprètes de musiques actuelles ? L'arrivée annoncée à la Villa Médicis de la chanteuse pop Claire Diterzi et du jazzman Magic Malik suscite des remous dans le milieu de la musique contemporaine.
Des compositeurs ont lancé une pétition sur internet (musiques-en-vrac.blogspot.com) pour protester contre cette première dans l'histoire de l'institution, révèle le quotidien Le Monde daté de vendredi.
Cette lettre ouverte au ministre de la Culture Frédéric Mitterrand et au directeur de la Villa Médicis Eric de Chassey avait été signée jeudi par plus de 600 personnes, dont les compositeurs Franck Bedrossian, Edith Canat de Chizy, Peter Eötvös, Jonathan Harvey, François-Bernard Mâche et Tristan Murail.
Les signataires estiment que les musiques actuelles, "plus populaires, touchent un public déjà nombreux et jouissent d’une médiatisation plus large que la nôtre".
"Notre réaction est un mélange de colère et d’inquiétude. Car il nous semble évident que ce que d'aucuns nommeront une +ouverture+ n’est que l'expression d'un désintérêt pour l'art non directement rentable au profit d'une production artistique qui, séduisante par essence, a la faculté de mettre tout le monde d'accord sans aucun effort", poursuit le texte.
Le réseau Futurs Composés, qui regroupe des structures et festivals de musique contemporaine, a pour sa part pris ses distances avec "un débat de chapelle qui pourrait laisser penser que les acquis des uns se font au détriment des avantages des autres".
"N'oublions pas l'assèchement grave du financement des politiques éducatives et toutes les amputations budgétaires qui fragilisent la création", a souligné le réseau dans un communiqué intitulé "la création musicale est en danger, ne la divisons pas".
Avec son prix de Rome, la Villa Médicis a consacré de nombreux compositeurs à partir de 1803, dont Berlioz, Bizet, Gounod ou Debussy. L'Académie a supprimé son concours de composition en 1968 tout en continuant d'accueillir des compositeurs en qualité de pensionnaires, généralement pour deux ans.
Nommé en septembre 2009 en remplacement de Frédéric Mitterrand, Eric de Chassey avait exprimé son souhait d'instaurer plus de "diversité" parmi les pensionnaires, de "désenclaver les disciplines" et de "dépasser les chapelles".