logo

Premières mobilisations des Espagnols après l'annonce du plan d'austérité

Les fonctionnaires espagnols manifestent aujourd'hui contre le plan d'austérité qui sera adopté par le gouvernement dans la soirée. Les syndicats déplorent une "rupture" et un virage antisocial de M.Zapatero, qui joue gros politiquement.

AFP - Les fonctionnaires espagnols protestaient jeudi contre la baisse de leurs salaires inscrite dans un plan d'austérité que le gouvernement devait approuver dans la soirée pour accélérer la baisse des déficits publics, sous la loupe des marchés et de ses partenaires européens.

Les centrales syndicales CCOO et UGT ont appelé les fonctionnaires à protester devant des bâtiments officiels de tout le pays dans l'après-midi, au moment même où le conseil des ministres validera par décret-loi ses impopulaires mesures d'austérité.

Pressé par les marchés et ses partenaires européens, le chef du gouvernement socialiste, José Luis Rodriguez Zapatero, a franchi le Rubicon la semaine dernière en annonçant des coupes sévères dans les dépenses sociales, s'aliénant les syndicats et une partie de l'opinion publique.

Le conseil des ministres doit approuver notamment une baisse moyenne de 5% du salaire des fonctionnaires à partir de juin et un gel de la revalorisation automatique des retraites en 2011.

L'Espagne, confrontée à des déficits publics de 11,2% du PIB et à de faibles perspectives de croissance, passe pour un maillon faible de la zone euro.

"L'Espagne est dans une situation très difficile car elle est potentiellement concernée" par le plan de secours de 750 milliards d'euros mis sur pied pour les Etats de zone euro en difficultés, a déclaré mercredi le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière, proche de la chancelière Angela Merkel.

Même si la Bourse espagnole a été très chahutée ces dernières semaines (l'indice Ibex-35 a perdu plus de 20% depuis début janvier), l'Espagne ne rencontre pas trop de difficultés pour émettre de la dette.

Jeudi, le trésor a placé 3,52 milliards d'euros d'obligations à 10 ans, plus que le maximum de 3,5 milliards d'euros attendu, à un taux moyen relativement raisonnable de 4,04%. "Les résultats ont été rassurants", ont estimé les analystes d'Unicrédit.

Mais en Espagne, le plan d'austérité place M. Zapatero en grande difficulté.

Les syndicats, avec lesquels il a toujours entretenu de bons rapports depuis son accession au pouvoir en 2004, ont déploré une "rupture" et un virage antisocial. Une grève générale des fonctionnaires est programmée le 8 juin et les centrales n'excluent pas de l'étendre par la suite à tous les secteurs.

"Ma responsabilité (...) est de penser à l'avenir de mon pays, plus qu'à un quelconque avenir politique et personnel", a déclaré dimanche M. Zapatero, dont la cure d'austérité qui frappe principalement les classes moyennes a été largement interprétée dans les médias comme une sorte de suicide politique.

Or les socialistes au pouvoir ne disposent que d'une majorité relative au Parlement, qui devra valider d'ici un mois le décret-loi.

M. Zapatero a jusqu'à présent toujours réussi à convaincre, au cas par cas, les indépendantistes basques et catalans, de le soutenir au parlement sur les dossiers économiques.

S'il n'y parvient pas cette fois et qu'il ne rallie pas les votes de la droite au nom de l'intérêt national, il s'exposera à une grave crise politique, avec éventuelle motion de censure à la clé.

Pour tenter d'apaiser son électorat, M. Zapatero a annoncé mercredi qu'il travaillait à une hausse d'impôts pour les plus riches.

Zapatero "est aux mains de la droite économique et politique", a dénoncé jeudi le leader des écolo-communistes de IU, Cayo Lara.

Le Premier ministre socialiste portugais José Socrates, dont le pays est dans une situation semblable à celle de l'Espagne, a défendu M. Zapatero sur la télévision espagnole.

Dire que M. Zapatero a trahi la gauche est "une vision infantile. La gauche doit être réaliste, elle doit faire courageusement tout qu'il faut pour défendre (...) le projet européen", a-t-il déclaré.