Entre novembre et décembre, le taux de chômage en Allemagne est passé de 7,1 à 7,4 % de la population active et concerne désormais plus de 3 millions de personnes. C'est sa première hausse en près de trois ans.
AFP - Terminé l'état de grâce: le marché du travail allemand est rattrapé par la crise économique comme en témoigne une nette remontée du chômage au mois de décembre, annoncée mercredi par l'Agence fédérale pour l'emploi.
Le nombre de chômeurs est repassé au delà du seuil des 3 millions et le taux de chômage brut, qui fait référence dans le débat public, a grimpé à 7,4% de la population active, contre 7,1% en novembre, a précisé l'Agence.
Et en données corrigées des variations saisonnières, jugées plus fiables par les économistes, le nombre de sans emploi a augmenté de 18.000. Cela met fin à une longue série de replis consécutifs du chômage depuis près de trois ans.
L'emploi s'était montré étonnamment robuste ces derniers mois, malgré l'entrée en récession à l'automne de la première économie européenne et la dégradation rapide de l'activité industrielle, très dépendante des exportations.
Les entreprises, notamment dans les secteurs à très forte main d'oeuvre que sont l'automobile et la chimie, ont entre-temps plus ou moins gelé leurs embauches, se sont séparées de milliers d'intérimaires et ont mis en place des mesures de réduction de la production et du temps de travail.
En France, le tournant avait eu lieu dès novembre. L'Allemagne met certes "fin à sa success story", note Jörg Lüschow, analyste à la WestLB. Mais la performance de ces dernières années est "remarquable": depuis début 2005, le nombre de chômeurs a reculé de 1,9 million, souligne-t-il.
En 2008, le pays comptait en moyenne 3,27 millions de chômeurs, son plus bas niveau depuis 1992. Et le taux de chômage brut moyen s'est élevé à 7,8%, en recul de 1,2 point par rapport à 2007.
"Les données de décembre montrent que la crise économique a atteint le marché du travail. Notre optimisme est en conséquence mesuré pour 2009", a prévenu le président de l'Agence Frank Weise, cité dans un communiqué.
Pour l'analyste de WestLB, il est trop tôt pour se risquer à un pronostic, en raison des incertitudes persistantes sur la gravité de la récession. Le nouveau plan de relance d'un volume de 50 milliards d'euros préparé par le gouvernement pourrait permettre de limiter la progression du chômage, espère-t-il.
Par ailleurs, le ministre du Travail social-démocrate Olaf Scholz a rappelé mercredi la volonté du gouvernement d'aider les entreprises afin d'atténuer les effets de la crise sur l'emploi. Berlin veut éviter les licenciements secs, en développant le recours au chômage partiel et à la qualification.
Le tout pourrait être financé par les réserves de l'Agence pour l'Emploi qui, grâce à la bonne tenue du marché de l'emploi ces dernières années, sont "importantes", a-t-il expliqué lors d'une conférence de presse à Berlin.
La dégradation de l'emploi risque néanmoins de peser fortement sur la consommation des ménages, et ce malgré le repli rapide de l'inflation et les éventuels allègements fiscaux du nouveau paquet gouvernemental.
"Même si les mesures de soutien aux ménages empêcheront sans doute la consommation de chuter, elles ne devraient pas être en mesure d'aider non plus l'économie en 2009", estime Ralph Solveen, économiste à la Commerzbank.
L'Allemagne pourrait connaître la pire crise économique depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Le ministère de l'Economie n'exclut pas un recul allant jusqu'à 3% du Produit intérieur brut cette année.